10 février 2012

Le cuistot de la semaine, la nuit du chasseur

Par Donatien


Ce fut une bien belle assemblée de Trappeurs. Car il y a toujours un trappeur qui sommeille sous la fourrure du Castor. Et notamment sous la fourrure de l’Eric puisque trois d’entre eux, et non des moindres, formant à eux seuls un bon quart de l’assistance, avaient bravé le blizzard et les loups pour gagner l’igloo de la rue de Bègles.

En attendant que le gros de l’équipe rentre de la patinoire où l’on supposait qu’un chacun était allé se consoler de la fermeture de Musard, les premiers arrivés patientaient blottis les uns contre les autres autour d’une belote de comptoir tandis que les deux frères Prévôt se démenaient à faire partir le poêle. Pour passer le temps on racontait la façon dont on était venus. Ski de fond pour Léo, le barde et Peyo, peaux de phoque pour Piou-piou et Jacky, Bobsleigh pour Lolo, Pépé, et le Tcho, raquettes pour Florian, Amélie et mézigue, skidoo présidentiel pour Arnaud, traineau à chiens pour Zeilles.

Et il était beau à voir ce musher avec sa pelisse en poil de grizzli, les poches pleines de tabac à priser. Son regard brillait d’un éclat inhabituel, associant le bonheur et la fièvre. Une fièvre d’orignal qui eut cloué au lit le plus vaillant des poseurs de collet. Et chacun de se demander en son fort intérieur, quelle force surhumaine, quel extraordinaire sens du devoir, quel amour fraternel pour son prochain transi de froid, avait pu lui donner la force de hisser les lourdes marmites sur son vaisseau des neiges, de braver les avalanches et de parcourir les hectares de glace encore fragile le séparant du trou.

Car, dans l’athmosphère boucané du souterrain, après le bénédicité entonné par le barde et son enfant de chœur (Stéphane Escassut), c’est à un véritable repas de noce que fut conviée la petite assistance. Un potage de chasseur plein de vitamines et de calories commença de dégeler les Archiball. Un rougail de bœuf aux olives sublimement épicé et accompagné de patates fondante amoureusement pelées acheva de réchauffer les c(h)œurs de la fruste compagnie. On causa équipe de France, pelouses chauffées (scandale ou solution ?), et Arnaud apporta quelques éclairages bien informés sur l’affaire Chabal-Berbizier. Mais c’était surtout Zeille qui nous tenait en haleine avec son repas en forme de récit biblique. Le Saint-Nectaire aux arômes de prairie, fleurait bon la Genèse et le jardin d’Eden. Les éclairs au chocolat et au café étaient des Assomptions et les pruneaux à l’Armagnac formaient un cantique. Le cantique des cantiques.

Ce sur quoi Zeille siffla ses chiens qui piaffaient dans l’entrée. Et d’un simple claquement de langue lança son équipage dans la nuit glacée. Sous l’œil bienveillant d’une lune ronde et dorée, comme une auréole.

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