20 juin 2012

Le cuistot de la semaine, avant travaux

Par Les poètes réunis



Le Barde :
« C'est la der du trou », annonça Arnaud au milieu du repas. J'en conviens, si le milieu n'est pas la fin,  il y concourt. C'était avant que la Jacouille ne célèbre sa retraite. Avec force bouteilles de champagne. Mais revenons en au début. Car avant que le milieu ne touche à sa fin, il lui faut un point de départ sans quoi, jamais, il ne pourrait prétendre à la position médiane qu'il occupe.

Donatien :
Le début de ce final, cher Eric, se trouve à Bègles. Non pas à Musard, ce qui aurait permis de situer ce mardi avant le commencent de la fin, c'est-à-dire avant la fête de la morue, mais à la plaine des sports, qui est vraiment la fin de la fin. Tu nous y manquas. L'affrontement dans la fournaise eut des allures de jugement dernier. Et le choix du Divin parmi les flammes fut sans appel, net et tranché comme un avis de Dudu. A Ses côtés pour l'Eternité des siècles : Jeanphy, Seb, Toto, Jeanfran, Amélie, Prez, Hamilton... Refoulé dans l'infinie damnation : Peyo, Luc, Ericléo, Amélie jr, Walem, Garci, mésigue. Vanité des vanités, tout est vanité.

Le Barde :
Et poursuite de vent, mon cher Don. Mais Jérôme n'est pas l'Ecclésiaste, il est le Carvalho. Et c'est déjà beaucoup. Le Carvalho avait fait les choses comme il faut. Son gaspacho avait quelque chose d'un ange. Pas d'une peau de vache, d'un ange. Ou d'une petite fleur si tu préfères.

Donatien :
Un lilas me conviendrait, oncle Archiball. Mais quelle comparaison oser pour cet osso buco de morue en son carapaçon de riz ensanglanté ? Hommage évident du douanier à ces hommes-poissons que sont les toreos ? D'ailleurs on n'était pas si loin de Pampelune comme on le vit dans l'affrontement de Toto et de whatelse qui suivit le deuxième tertio. Ni sang ni sangria en notre arène souterraine. Mais du poivre et du café. Manquait plus que le tabac, le goudron et les plumes.

Le Barde :
Le Carvalho prit les assiettes, toisa la tablée, mit sa main sur la première, la saisit, promenant, ça et là,  son regard pour déterminer sa proie, et jetant son dévolu sur Hamilton qui laissa passer l'obole, il accéléra le rythme de manière frénétique, comme possédé. Et sans doute l'était-il le Carvalho car ce n'était pas le douanier qui officiait mais une créature à l'adresse inhumaine. Parvenu au terme de son labeur, il s'inclina et regagna sa place parmi les vieux, rompit son oiselet et son nectar de saint-Nectaire. Un calme étrange, inhabituel régnait. Même What Else n'en pouvait mais.
Et chacun de contempler religieusement toutes les splendeurs du trou. Ses reliques comme son anatomie. Car c'était la dernière en notre vieille maîtresse (avant lifting). Notre cœur était partagé : triste d'être au bout de la fin, heureux de nous trouver à l'orée d'un début. Un douanier n'était pas de trop pour nous conduire en ce délicat passage.

Le blogueur :
Une Chimay s'il vous plaît.

17 juin 2012

Le cuistot de la semaine, 3 tweets qui ne fâchent pas

Par Donatien


Le tweet de Lourdes :
Miracles sur le pré. Handisport dans le cresson : #Toto manchot (doigt cassé) & #Pascal R unijambiste (claqué) font le match. #Guitou à genoux.

Le tweet du chef :
Mon soutien à #Thom. Son banquet de saveurs : fraicheur et franchise, de la terrine à la verrine. Lancer : ball-trap. Ambiance : bal musette.

Le tweet explicatif :
#Waaaliiiiiiiiid : bien reçu ta consigne. Fais court pour faciliter lecture sur téléphone intelligent pendant réunion de chantier ou CA.

15 juin 2012

Les 40 ans des Archiball Côte Basque : Un Titi sinon rien.

Par Le Blogueur et Le Barde
Merci à Marina pour les photos


Pour savoir si on est bien à Biarritz, c'est simple, soit vous regardez les prix dans les vitrines, soit vous regardez les bouches refaites des vieilles biarrotes qui ont l'air d'avoir avalé un zodiac. Ici, les cougars ont un appartement avec vue sur la mer et la vierge juste un rocher. Conclusion : nous y sommes. Un peu en retard sur l'apéro mais nous y sommes. Nous constituons la deuxième fournée bordelaise. Nous rejoignons le vendredi soir ceux qui y sont depuis le matin à boucher les 18 trous du golf. Une troisième fournée de gardons frais arrivera samedi matin pour le tournoi.
Ce deuxième groupe méritera le nom du groupe de la mort, Gwen étant dans le tirage et toute halte est synonyme d'une bière.
La ville baigne dans la douceur pré-estivale et on se dit que, chouette, il y en a pour tout le week end. Si je le précise, c'est que ce ne sera pas le cas. En attendant, on boude pas le plaisir d'un demi sur une terrasse où défilent les fausses blondes qui ne se doutent pas un instant que le point G a rendez-vous avec le stade Aguilera dans moins de 24 heures.

Premier rendez-vous du programme concocté pour les festivités des 40 ans : apéro à la peña de la filière basque des Archiball. Comme je n'y étais pas, je fais confiance à Toto qui nous a dit, en un mot : c'était super ! Sans ça, il suffit de voir sa tête. Un voyant à lui tout seul qui annonce le niveau d'huile de tout le groupe qu'on retrouvera à la Cidrerie de Bayonne.
Dans ce lieu de trois étages, toutes les équipes invitées étaient attablées par grappes de dix. Une grappe plus importante composée de divers barabarians était scotchée aux tonneaux de cidres. Pour ceux qui n'ont pas dépassé le bassin d'Arcachon en direction du Sud, le cidre du pays Basque se boit directement à la kupela (le tonneau). Un bon jet est lâché à l'ouverture du txotx (le robinet du tonneau) qu'il ne faut pas raté avec son verre tenu à une soixantaine de centimètres. C'est rigolo au début parce que ça nous rappelle notre période (guère lointaine) de pipi/caca. Mais au bout de quelques litres, le verre se rapproche de plus en plus du robinet histoire d'arrêter de sourire bêtement parce qu'on en met partout sur nos bras, nos pieds ou... le dos du mec assis à la table à côté.
Comme le cidre est préconisé sur une tortilla, un poisson, une viande et du fromage de brebis. On a eu une tortilla, un poisson, une viande et du fromage de brebis. Il faut choisir ? me dit Le Barde. Non, non, on aura les quatre. Histoire de ne pas laisser le cidre maître de notre estomac jusqu'à la chiasse.
A minuit, l'affaire était pliée dans la joie et la bonne humeur. Deux ou trois chansons et au lit tout le monde. Nous, on se retrouve sur le trottoir. C'est qui nous ? Le Barde, Zeille, Titi, Toto, Le Toulousain, Gwen, moi et quelques douces de nos compagnes. Mais les choses qui nous arrivent sont toujours exceptionnelles, il y a, comme par magie, le bar dans lequel Toto a passé toute sa fraîche jeunesse, juste en face. Il n'y a qu'à traverser la rue piétonne large de deux mètres. C'est pas là qu'on va se claquer !

Avec quelques heures de sommeil dans les pattes, certains rappliquent stade Aguilera pour 10 heures. Le volet sportif du week end démarre avec un tournoi à toucher pour toute la matinée. Deux poules de quatre, sur une moitié de terrain, pour des matches de 2x10 minutes. Les organisateurs prévoyaient sans doute des joueurs de tous âges, suffisamment pour que certains fassent un toucher le matin et les autres un plaquer l'après midi. Chez nous, c'est pratiquement les mêmes, à un Titi près. Titi a préféré venir montrer ses mollets de cycliste juste pour l'après midi.
Ceux qui sont arrivés directement de Bordeaux le matin ont bizarrement moins chaud. Les autres ont la bouche sèche. Ils ont vite tombé le maillot après les premières dix minutes. Le Barde et Gwen, en Topless sur le bord du terrain, avaient l'air de manifester sous la coupe de Femen pour stopper la prostitution en Ukraine pour l'Euro 2012. Sur le terrain, les Castors du 33 gagnaient le premier duel contre l'équipe B des castors du 64.
On déroule tranquillement contre des Belges pour qui la frite va mieux que la gonfle. On se retrouve ensuite contre des Espagnoles que Zeille aurait décapité l'un après l'autre : ils ne jouent pas à la faute, tapent des en-avant volontaires bien plus que la moyenne, ne se replacent jamais. L'arbitre aurait préféré troquer un Pastis contre ce match tellement il en avait rien à branler. On perd le match et on finit classé 2e sur 4 de la première poule.

Pause Pizza/bière/tarte. Pour des rugbymen, on a fait mieux !

Viennent ensuite les matches à plaquer. Ça ressemble déjà un peu plus à quelque chose et pour cause, quelques anciens du BO nous rejoignent. Lafourche se frotte les mains d'impatience. Notre cartouche locale est en forme, aussi bien au lit que sur le terrain. On retrouve justement les Espagnols qui, ayant oublié de le préciser plus haut, ont un caractère, et surtout le physique, bien basque.
Notre niveau rugbystique atteint le miraculeux point G, la jouissance, l'orgasme absolu. Il était reconnaissable à la lettre G flanquée sur son maillot comme un drapeau sur une pub du Conseil général. Sans doute choisi pour le G de Garcimore, ou Gruneisen, Denis a mené la meute des Archiball comme des morts de faim (euh, facile avec un quart de pizza !). Il nous a montré, cheveux au vent, le chemin du ballon. Il était le Guide. Il était le Gourou. Plein de hargne, il n'attrapait plus le ballon avec les mains, mais avec les dents. Pour savoir où était le ballon, il fallait savoir où était Denis. Il répétait à qui voulait l'entendre : « Surtout, tu déconnes pas. » C'est comme ça. Le castor d'or aurait été logiquement attribué à ce foufou de Garcimore. Sauf que là où y a point G, y a Titi. Et ce Titi rodait tranquillement sur le terrain en attendant l'heure de la chevauchée glorieuse. Mais ceci est une autre histoire.


Garcimore, le point G, le Gourou, le Guide spirituel des Archiball à Aguilera.

C'est l'histoire d'un deuxième match qui, comme le premier, avait une mi-temps sur le terrain annexe et une mi-temps sur le terrain d'honneur. C'est l'histoire d'un match contre les charlots d'Agen. C'est l'histoire d'un match où il s'est passé beaucoup de chose mais qu'on oublie vite pour une seule action. Et l'histoire de cette action est ici racontée par le biblique Barde :
Alors, il prit le ballon échappé des mains de ses adversaires, gisant sur le sol, et, dressant son buste, il jeta un regard à droite, puis à gauche, comprit que sa destinée serait solitaire et s'élança. Pas âme qui vive à ses côtés, et au loin, si loin, la terre promise d'Aguilera. Il entama une course folle. Et c'était merveille que de le voir dévaler de la sorte, soulevant des mottes d'herbe à profusion tant sa foulée était puissante, poursuivi par des charlots impuissants à le rattraper lors que ses frères accompagnaient sa chevauchée fantastique de leur cri qui, sans nul doute, lui procurait l'énergie nécessaire à l'accomplissement de son dessein. On crut un instant qu'il échouerait, que l'adversaire le reprendrait, à quelques mètres de la ligne. Il n'en fut rien. Il déposa la gonfle d'une main souveraine, revint vers les siens avec une infinie humilité, épuisé, à bout de souffle mais certain d'avoir ajouté une page à la légende d'Aguilera. Une ovation s'éleva du bord de la touche, un chant ininterrompu. Jean-Bernard pleurait, Kiki dressait un doigt vers le ciel pour remercier celui qui est l'origine de toute chose et qui nous offre, parfois, des moments de grâce. Il prit un peu de la terre d'Aguilera, la glissa dans sa poche, se promit de la déposer dans sa villa arcachonnaise et, chaque matin, d'allumer un cierge pour célébrer ce souvenir incandescent. Qu'importait, dés lors, le résultat de ce match ! Il n'en resterait que cet-instant-là, cet exploit à nul autre pareil, digne des Dieux, car il est Dieu celui qui enfanta une telle action, ou fils de Dieu, ce qu'il a entrepris, aucun homme n'était en mesure de le faire, sinon Lui, démontrant, si besoin en était, qu'il était beaucoup plus que lui-même, l'incarnation de tous les possibles. Ceux qui ont vu, de leurs yeux vus, ce prodige, savent désormais que leur vie sera marquée à tout jamais par la course folle d'un pinson sur la dive pelouse d'Aguilera.
Voilà, on a pas de ralenti. Mais vous pouvez toujours relire le texte du Barde doucement.

Titi sur le terrain, à l'affût d'une balle perdue par l'adversaire.

Au Casino, la soirée de galoche a pris des allures de Titi For Ever. Sa chevauchée fantastique était sur toutes les lèvres, aussi bien à l'arrêt saumon fumé qu'à celui du foie gras et, même, celui des huîtres (Dudu, on a eu une pensée pour toi). Tout le monde en parlait. Quelqu'un m'a dit : « Les grands joueurs ne meurent jamais. » J'espère pour ma part que mon 1m88 me classe dans la catégorie des grands joueurs.
On s'enfilait les brochettes de crevettes grillées en pensant Titi. On fixait l'horizon de l'océan de la terrasse du Casino en pensant Titi. On avalait nos coupes de champagne en pensant Titi. On suçotait les cuillères dégustation d'encornet en pensant Titi. On resserrait nos cravates et pompait nos mégots en pensant Titi. S'il fallait draguer ce jour là, il fallait dire qu'on joue au rugby avec Titi. Caille assurée.

Perdigue était là mais il avait l'esprit ailleurs. Il était venu en famille comme le cirque Romanes (Ah, les godasses blanches de Perdigue, c'est mon numéro préféré). Il n'avait d'yeux que pour Oscar qui lui en faisait voir de toutes les couleurs. Il aurait pu remettre l'Oscar à Titi pour le meilleur rôle sur le terrain, histoire de souffler un peu, mais il ne voulait pas.
Gwen propose de mettre Titi sur le maillot des Archiball pour la saison prochaine. Le Toulousain, beaucoup plus raisonnable, de remplacer le castor sur le logo par un Titi stylisé. Zeille, subtile, voulait remplacer le mot "doigt" par "Titi" dans l'hymne des Archiball, si bien que : Je mets Titi devant, je mets Titi derrière, je mets Titi dedans, je fais un tout petit rond...

Mais c'est le président qui a eu le meilleur hommage. Dans ce discours, Titi faisait partie de son EDL saisi sur son Iphone. Sous un béret offert par le castor en chef basque et qui lui donne immédiatement un air de Luis Mariano, le président porte Titi aux nues. Attendez Messieurs, ne rêvez pas, les nues ne sont pas une troupe de femelles à poil et en rut ! Il s'agit d'une image pour évoquer quelque chose de très haut, puisque « nues » désignait autrefois les nuages. Là où Dieu s'allonge pour regarder Titi jouer au rugby.
Alors, vous pensez bien. Avec le président amplifié qui parle à toute la salle de Titi par ci, Titi par là, ceux qui n'ont pas mouillé le maillot, ont mouillé la culotte. On aurait eu des T-shirt avec Titi dessus, on aurait tout vendu. Le succès devenant énorme, Titi s'éclipse très tôt dans la soirée promettant à sa douce une nuit de rêve loin des chimères du succès.

Sous l'insistance de Garcimore, allant jusqu'à lui trouver un micro – « Surtout, tu déconnes pas. »  –, l'Amiral a bien essayé de consoler la foule avec sa vraie version de Mener la vache au taureau, aidé par un Zeille déboussolé entre la "Va" et le "la". Rien n'y fait.
Même "Le doigt" n'a pas soulevé les foules. Peyo s'y est donné pourtant à fond, particulièrement à « Je mets la queue dedans » qui, sur le coup, nous a rappelé Jean-Pierre Armand sur Brigitte Lahaie dans Parties très spéciales. Sauf que Peyo avait Fayou à côté.
Un orchestre a sorti le meilleur de lui même. Il nous a fait toute la gamme Guitar Hero version Wii feet, des reprises dignes d'un travail archéologique (j'ai cru reconnaître les cromagnons des Bee Gees). Rien n'y fait non plus, sauf chez Le Toulousain devenu fou à mimer les solos à vide.
Jaloux de la Titimania, un cousin basque joue le Golden Boy après la morue qu'on a eu comme plat. Il monte sur la table et danse comme un vers au bout d'un hameçon. Faute de mieux, ça a pris. Le Toulousain observait le danseur avec une fougue retenue pour en faire autant. Les yeux de la Toulousaine brillaient de la même manière et se disant intérieurement : « Mais, c'est ça que je voulais !». Elle n'était pas la seule, toutes les filles ont mordu au déhanché sur les Black Eyed Peas. Et là, tout le monde s'est mis à danser. Tout le monde, sauf le grand Thom et le petit Tom. Le dernier a préféré déchirer des chemises avec une cravate nouée autour de la tête.

Le lendemain, une nouvelle mode est née à Biarritz : le petit écart entre les deux dents de devant (les incisives centrales me souffle Lafourche). En couple, Titi se réfugie en Espagne pendant que trois Archiball font acte de présence pour le pique nique sur la plage de Milady. La pluie gâche la fête. Le beach rugby est remplacé par un concours de capuches. La paella est remplacée par des sacs plastiques avec un sandwish jambon/beurre, un beignet à l'huile et un soda. En compagnie des Belges, on a bouffé nos sandwishs en buvant du rosé entre les gouttes. De loin, On aurait dit une pause déjeuner d'une classe de troisième emmenée par son prof d'histoire sur la route des plages du débarquement.

Pour le retour à Bordeaux, je peux vous le dire maintenant, je suis rentré avec Titi. J'étais aux anges.

09 juin 2012

Le cuistot de la semaine, du latin Cucumis

Par Le Barde


Ainsi ne fûmes-nous qu'une petite poignée sur la plaine des sports à tâter de la gaule, sans doute par la faute à un  week-end basque épuisant où nos corps furent mis à l'épreuve sur la pelouse d'Aguiléra, retentissante encore de la chevauchée de Titi. Le poids des ans pèsent inéxorablement sur nos constitutions mais nous nous en moquons, cherchant sans fin des joies enfantines dans la compagnie d'un ballon dont on ne chantera jamais assez les louanges. Car le rugby est un chant, une épopée sans cesse réécrite, une odyssée sans fin et sans Pénélope, sans Ithaque, car le pré ne saurait être une Ithaque puisque sa terre promise n'est, au bout du compte, que l'accomplissement d'une destinée provisoire tant que la clepsydre n'a pas décidé de la fin des hostilités.

Pascal avait en mains les destinées du trou. D'un large sourire, il accueillit la petite meute aux traits marqués. Les vieux avaient accompli leur besogne. Et Pascal offrit en préalable une soupe d'un vert pâle qui devait l'essentiel de son teint à des concombres dont on ne dira jamais assez l'onctuosité pour peu qu'elles soient préparées avec ce qu'il faut de savoir-faire pour leur procurer ce zest de goût dont une nature injuste les a privées. Et c'était en quelque sorte la chanson de Brel, « et ça fait de grands slurps, et ça fait de grands slurps... »

Après cette entrée en matière, toute de délicatesse, Pascal qui connut de grandes traversées et de lointains pays, se défaussa de sa culture occidentale, nous conviant à un tajine dont la grâce inépuisable se gaussait de nos ventres repus, et c'était miracle de voir nos bras se tendre sans fin vers le couscous et le poulet parsemé de courgettes, d'aubergines, baignant dans le frais cresson bleu. Cresson bleu, cresson bleu me dit la jacouille, une pinte à la main, mon barde ton cresson a des allures de tomates. Certes lui répondis-je mais il y a quelque chose de rimbaldien dans ce tajine, et tu conviendras qu'avec Pascal, nous sommes au pays de la vraie vie, celle dont Arthur écrivait qu'elle est ailleurs.

Pascal, c'est notre ailleurs, une part de la vraie vie.  Et puis, ma Jacouille, comment ne pas citer, à cet instant de notre échange si fécond, cette pensée de l'autre Pascal : « Il n'y a rien de si conforme à la raison que ce désaccord de la raison. » D'un pincement de lèvres où subsistaient, ça et là, des traces de mousse, la Jacouille opina, ajoutant une autre pensée de Blaise, sous l'œil stupéfait de Lolo,  pour clore le débat : « Combien de royaumes nous ignorent ? »

Le lancer d'assiettes fut parfait. Elles paraphaient l'air de leur trajectoire précise, et sinueuse pourtant, trouvant sans peine les mains qui les attendait avec impatience. Pas la moindre marque d'inquiétude sur les visages. Le fromage fut une formalité, une évidence, un retour à nos traditions françaises après cette incursion orientale et la soupe baignant dans le frais cresson bleu.

Et ce fut le dessert. Des fraises dans leur ramequin de verre, suspendues à un fromage blanc ferme et tendre. Mettre un terme de la sorte à sa besogne traduit l'essence-même de Pascal. En quoi Blaise avait raison dans sa foi envers le jansénisme. Certains êtres sont prédestinés. Et il en est Pascal. Oui Dieu reconnaîtra les siens, et Pascal est un dieu parce que toujours, il sait rester humain. « La vertu d'un homme ne se mesure pas par ses efforts mais par son ordinaire. » L'ordinaire, chez Pascal, est touché par la grâce.

01 juin 2012

Le cuistot de la semaine, l'ostréiculeur

Par Le Blogueur


« Ha ! Quel bordel. Si j'avais su, me disait-il, si j'avais su ! » Si tu avais su, tu n'aurais rien changé mon Guitou. « Si c'était moi... ». Non plus mon Guitou, si c'était toi, tu n'aurais rien fait. « Un grand joueur comme moi... ». Non plus mon Guitou, non plus. Un grand joueur ou un petit, au rugby, c'est pareil. Tu le sais. Tout le monde a sa place. S'il y a bien un sport fait pour tout le monde, c'est bien le rugby. Les grands et les petits, les gros et les fins, les blonds et les rouquins, les bruns et les poilus... tout le monde peut jouer au rugby (c'est en tout cas ce que je croyais jusqu'à ce que je rentre aux Archiball). « Oui mais moi, avec le corps que j'ai... » Mon Guitou, avec ou sans le corps que tu as, les terrains sont interdits. Celui du fond comme celui de droite, et même celui d'honneur où l'on ne tombera jamais comme sur un champs. Alors, prends ton sac et viens avec nous. On trouvera bien quelques brins de gazons à brouter à la plaine.
Nous voilà partis sillonner Bègles à la recherche de la plaine. Une escadrille de scoots est partie ouvrir la route ; Léonard avec sa réédition vintage, Titi avec son tricycle et moi sur ma tondeuse. Jean-Phi a mendié un casque pour vivre son quart d'heure de Bad boy sur un deux roues, il a fini sur le trois roues de Titi.     
Pour ceux qui ne le savent pas, la plaine des sports de Bègles est coincée entre la plage et l'autoroute. Et j'ai bien peur que certains que l'on a plus vu de la soirée se soient retrouvés, sur ces indications, au stade Vélodrome.
Sur la plaine des sports, l'herbe est verte comme nulle part ailleurs. Le terrain a de drôles d'en-buts qui sont faits de filets d'écrevisses. Mais ce coucher de soleil entre les immeubles avec vue sur la rocade nous a suffi pour faire une partie endiablée de rugby à toucher. Quelques jeunes en manque de clubs en cette fin de saison sont venus "pimenter le jeu" (l'expression est du président, lui aussi en manque de club mais ça n'a rien à voir avec la fin de saison.) Et à en croire ceux qui l'ont dit, c'est le réseau Florian. Étonnant comment ces jeunes se multiplient alors qu'ils ne se reproduisent pas en vrai. Il y avait donc du 25, du 27, du 28 et du 28 ans et 1/2. Bandant non ? Je parie que Kiki les aurait reconnus à l'odeur du slip.
Bref, quelques 50 remontées du terrain et autant de redescentes, sans oublier les 350 piqûres de moustiques (il y a la plage à côté on vous dit !), l'éclairage naturel baisse d'intensité. Les douches sont à 90 °C et les vestiaires de série change du luxe Top 14. Guitou a pleuré un bon coup choqué par autant de misère sur terre. L'endroit s'est vite transformé en étuve à raviolis vapeur. On a beau se sécher mais rien n'y fait, on refait son eau comme une huître. Prémonitoire !

Au trou, il y a Kiki. Un Kiki dans un trou, c'est un fantasme de jeunesse. De ce fantasme, beaucoup d'Archiball et non Archiball sont venus débattre. L'assemblée était fournie comme une grappe de moules sur un pieu. Là où y a Kiki, y a forcément une petite odeur de marée, une odeur du Bassin. Je ne parle pas d'anatomie, je parle du bassin d'Arcachon. Kiki est notre vahiné des sables, notre pin tortueux des grandes dunes, notre courlis du banc d'Arguin. Alors vous pensez bien qu'entre quatre murs en sous-sol, Kiki fait office de soleil. Au coucher, il est magnifique.
Un peu partout, Kiki dispose ses huîtres avec un air d'entretenir ses parcs. Des huîtres taille 2 (à vue d'œil), charnues et bien pleines. Il y avait plus de douzaines que de bouches à nourrir. Et comme d'habitude, les huîtres remportent un succès incontestable. Elles ont mis tout le monde d'accord et tout le monde à table.
Du brouhaha, on est passé à slurrrrp et chlupsssss. Selon si on porte l'huître à la bouche avec une fourchette ou si on porte l'huître dans sa coquille pour la gober.
A marée basse, Kiki a prévu le vin blanc sec et le rosé. Le tableau estival est complet. J'ai bien fait de venir en short.
A table, les coquilles s'entassent dans les assiettes et dans les saladiers. Les plateaux sont même pas vides que tous déclarent forfait. Sauf un ! Dudu. Dudu la dorade. Dudu le bigorneau perceur, le légendaire prédateur de la Crassostrea gigas a décidé d'achever l'introduction de l'huître au trou et de prendre à son compte la disparition du mollusque marin bivalve. Il est comme ça Dudu, ne lui mettez pas un bivalve sous le nez, ça le rend fou.
Toujours sur le thème marin, Kiki porte les petits plats de paella. Là, on s'est dit que Dudu allait être aux anges. Dudu, le roi de la paella, ne bronche pas. Avec une tête de chapeau chinois, il ne décolle pas des dernières huîtres restées sur la table. C'est plus treize à la douzaine, c'est dix douzaines à la douzaine.
Viennent ensuite le fromage et le dessert et le café et le cigare et l'armagnac. L'un après l'autre. Le fromage à la hauteur du reste. Le dessert abondant et variée. Le café fait par Jacky ne se discute plus. Le cigare au tirage facile. L'armagnac concentré de saveurs. C'est là toute la patte à Kiki.

Un dernier mot pour la photo. Autant vous dire que devant la grande difficulté de sélection parmi toutes celles qui ont été prises, la planche contact s'est imposée. Même s'il y en a qu'un, Kiki est multiple (Tiens, me voilà possédé par le Barde !).
Allez, je tape Enter. Le blog est fait. Je ferme ma valoche et direction Biarritz. Agur !