Par Le Barde et Bardibulle
Pas un ballon tombé, pas un mot plus haut que l’autre, pas une seule passe superflue, pas l’ombre d’une bafouille. Rien, le néant, le vide. Faute de pré. Musard était occupé ; nous étions gros Jean comme devant Les espoirs de l’UBB jouaient contre ceux de Lormont.
Las, nous regagnâmes le trou, la béchigue en berne, un peu grognon. Peyo nous consola. Nous nous mîmes à table plus tôt que de coutume, orphelins de Pépé. Une petite tablée. JB nous rejoignit à l’heure où, d’ordinaire, nous commençons nos hostilités gustatives. Et Toto, de retour de Pala n’arriva qu’au plat principal. Toto, il va à l’essentiel. Les préliminaires ne sont pas sa tasse de thé. Le vieux quatre également descendit l’escalier sur le tard.
C’est l’hiver. L’automne touche à sa fin. Rien de tel qu’une bonne soupe pour affronter les premiers froids. Une soupe au potiron avec ses croûtons et ses pincées de râpé. Douce, suave. La suite trouva son pays. Ses origines taquinent les vallons et touchent ses sommets. La tartiflette est un réconfort dans l’hiver. Une douceur dans le dur. A ne pas confondre avec la raclette. L’un rompt la glace, l’autre mijote le reblochon. Lard mérite son fromage. Peyo réussit à faire se rencontrer ses montagnes. Des Alpes aux Pyrénées le liant tient dans le piment. La nature a ses lois. Pour gravir les sommets fini les haricots pour faire place à la chaleur du fromage fondue. Le vieux 4 depuis quelques temps ne compte les plats en patates. Le mois est rugueux et nécessite le calorique.
Le choix fait l’union à table. Le pack se resserre dans la resserve. Le trou trouve son sommet. Dehors il fait froid. Les municipales sont en route. Les listes s’impressionnent. Des candidats en lice. Nous eûmes des annonces. Haranguer la foule est une chose, unir les hommes est tout autre. Bègles a des perles. Il ne faut que peu de mots à Amélie pour répondre aux besoins de sa ville et unir ses castors dans la cité. Le poulain pousse son étalon. La réponse fut unanime. Le message est clair, simple sans équivoque. La troupe ne fait plus qu’un. La politique dans son sens premier qui relie le corps aux désirs du peuple. Un mot, une cause, un leader. Votez Amélie !
Le chœur des hommes a ses raisons et que la raison des cœurs ignore. Peyo apporta au lancer d’assiette un petit grain de folie. Sa première tentative ne trouva pas la main de Lolo. Et il ne trouva pas davantage celle de Tautau qui en fut pour une estafilade juste au-dessus du nez. Peyo redevint sage. Pas d’antienne sur le fromage faute de fromage. Tartiflette oblige. Nous avions eu notre comptant de Reblochon. Pas une voix ne s’éleva. Pas même le vieux quatre.
JB conversait avec Léo, assis à sa droite. Croucrou conversait avec Amélie sis en face de lui. Le moment mérite son analyse. Freud sort son calepin, son stylo, et tire sur sa pipe. Peyo allongé sur le divan : « Je ne comprends pas tout se passait si bien, je n’ai rien vu venir… ni Didier d’ailleurs. La soupe était bonne, les fromages, les croutons… la tartiflette… nickel. Je me souviens, j’ai vu Tautau descendre et Croucrou lui rappeler qu’il était zinzin mais à ce moment-là on ne savait pas… ». Silence. Le regard s’évade dans le souvenir. Freud souffle la fumée et griffonne un Z comme zinzin pour s’éloigner du petit a. « Et ?... » Pour amorcer une suite sans trauma… Peyo : « Je me suis trouvé bien, je me souviens de mes mots les gars pas de fromage, j’ai tout mis dans le principal… mais donnez-moi les assiettes et Lolo s’il te plait lance notre lala ! … » Freud curieux : « Le rite vaut son discours mais quelle est la vocation du lancer si il n’y a pas de fromage ? » Peyo : « C’était plus fort que moi, je me sentais bien, en confiance. Vous auriez dû me voir avec mes acromions toutes neuves et mon fameux lancer en touche. Une belle époque. Le seul moment où je balance maintenant c’est pour le fromage ! » La voix tressaille, la gorge se serre, la nostalgie pousse le cuistot dans le silence. Il respire et reprend son travail. « Mes camarades ne sautaient pas, mes lancers en rase motte s’attrapaient les yeux fermés… » L’association prend place, le basque en cathare tique… « Putain les yeux fermés… Zinzin s’est pris du Sabite dans l’œil ! ». Freud culmine et tient son article: « Œdipe s’est crevé les yeux pour moins que ça ! Peyo tu es un mythe pour ton lancer infernal ! » Peyo : « Le réel ne mérite pas un jeu d’arcade… je n’ai rien pu faire sur le moment ni après d’ailleurs. Heureusement que Dudu sait recoller les morceaux. » L’émotion soulage. Freud : « Le lancer est sacré comme les histoires des castors. Pas de traumatisme sans répétition. Croucrou l’avait prédit. La pythie vient en mangeant. Le bougre… Avec le temps certaines cicatrices sont douloureuses et d’autres nous rappellent que nous sommes toujours de bons vivants !
Sur ce, la séance est écoulée, nous nous revoyons mercredi prochain. » Peyo léger quitta le cabinet. Dans la salle d’attente, un patient patiente. Le rite n’en a cure. Freud après un temps pour poser ses notes sortit de son antre : « Zinzin, c’est à vous euh… Veuillez m’excusez, Tautau je vous prie, si vous voulez vous allongez, la place est chaude… » Freud alluma sa pipe et plongea dans une attention toujours flottante. Dans la cure comme dans le trou, les inconscients ne touchent que si l'attention flotte! Une belote de comptoir. Sergio eut la main heureuse. Dudu un peu moins et épargna au vieux quatre une défaite annoncée. Le Tarbais s’en sortit. Et le barde, la main toujours aussi pauvre profita des annonces trop ambitieuses de ses comparses. La nuit était très belle. Une nuit d’hiver au ciel si pur. En sortant, Jacouille chantonna Mon coeur s’ouvre à ta voix. C’est un tendre notre Jacouille.