Quel entraînement mes amis ! À la fois ultra-physique, délicat techniquement malgré une bonne volonté général, parfois furtif. La bonne volonté s'est imposée dès les vestiaires ou l'arrivée d'une jeune recrue de 8 ans en la personne de "loulou" imposa une remise en question générale : "putain, et si le club décidait de se débarrasser des vieux ! " pouvait-on lire dans le regard inquiet voir vide de certains. Emmanuel « Macouille », le réforme du code du pas beaucoup de travail. Y avait-il un lien ? Du coup, certains comme Luc avait revêtit un ensemble veste pantalon de k-way pour affiner une musculature déjà travaillée par des milliers d'heures de salle de musculation. Cependant, le forfait périmé en bandoulière laissait imaginer que son intention première était d'aller au ski. Il s'arrêta à Bègles : maudite rocade !
D'autres, enfin plutôt un, avaient acheté un survêtement furtif. Vous me croirez ou pas, ça marche. Car, si on l'a vu rentré sur le terrain, personne ne le vit sortir...
Les échauffements furent sérieux, le moelleux du synthétique aidant. La répartition des équipes se fît différemment qu'à Victor Louis où les deux camps du premier terrain, c'est-à-dire en but 22 est à égal distance des vestiaires. À musard, il n'en est pas de même, car sortant des vestiaires, vous pouvez vous arrêter dans le premier camp si vous êtes feignant ou si vous êtes gaillard, traversez ce dernier pour rejoindre l'autre camp, celui des gaillards donc pour ceux qui ont du mal à suivre. Certains me feront remarquer que les trois, voire deux, voire un, tours d'échauffement remanient les cartes. Et bien non, car ce sont des tours complets qui partent et termine dans le camp des branleurs. Et si certains souhaitent batailler sur ma théorie, qu'ils me disent pourquoi Lapiballe est toujours du même côté... Ceci étant, des deux côtés la partie fut délicate techniquement. Il est de bon ton de dire au rugby que la passe est une offrande. Au risque de filer la métaphore mathématique, j'admets que cela est nécessaire mais pas suffisant, car si l'émetteur se doit de s'appliquer, le receveur également.
Mardi soir, si pas mal d'offrandes venait de la foire-fouille certes, il y eut un nombre incalculable de "n'habite plus à cette adresse". Tout le monde y passa : le recommandé sans la carte d'identité, la carte postale coincée dans la boîte aux lettres, la facture négligemment posée sous la pile de chaussettes. Personne ne voulait du ballon. Et alors que tout le monde s'était exténué à faire tomber ce putain de ballon, Titi arrivé royalement 25 minutes en retard nous demandait d'en faire une dernière. Vous le connaissez Titi, belle gueule, un physique du charisme, le smile. Alors tout le monde repartit pour Titi, enculé !
Alors que plus personne ne voulait la balle, jaillit El perdigon ! Formé dès l'âge de trois ans dans un cirque espagnol, El Perdigon est né d'un père unijambiste funambule, d'une mère aimante bien que croqueuse et plieuse de poêles. Il est également le frère d'une sœur dont le numéro phare était de sculpter au tour à potier un porte-bougie entre …ses seins. Ce dernier point pourrait d'ailleurs expliquer certains schémas mentaux du Perdigue... Bref, le petit Perdiguon apprit très tôt à manier la massue, le bilboquet, le yoyo, les portes bougies de sa sœur dont certains avaient le bout pointu bizarrement, alors attraper un ballon de rugby lancé comme un frelon ! Grandissant, il trouva sa patte en terminant ses numéros de jonglerie d'une ouverture des bras simultanée à un tapé du pied jambe droite en avant, le bassin légèrement ouvert, accompagné de l'onomatopée criée suivante : « hay ! ». Et bien hier, le dernier essai fut un essai "hay".
Perdigue en l’Auguste, nous orienta vers la douche. La douche est un sas de décompression. Elle dénude les hommes et pour ce soir les ébouillante. C’est un plus à Bègles ! Une ambiance hammamesque… Seul Titi se fait attendre. Il est ainsi, son corps il le bichonne. Perdigue a sacrifié la beauté du geste pour l’efficacité. Titi en opposition vénère la technique. Le style est puissant, percutant, imposant et se paie en étirements. Le Trez se joue sans étirements, c’est bien connu.
Pour le trou c’était une première pour Jeff. Un jeune lettré ! Il est de tradition dans cette période de vacances scolaires de profiter du trou en intimité. Les castors sont migrateurs et montagnards. C’est bien connu. Bref, nous profitâmes de certains aventuriers derrière le zanzi-bar. Nous la jouâmes pluri-génération. Il y a au moins 70 ans de différence entre toutes les paires en présence. Pépé en doyen, Jacquot et le Tcho en pères protecteurs et les castors en affamés. L’homme de bouffe sera-t-il à la hauteur ? L’homme est grand physiquement, il ne peut jouer en première ligne trop ingrate dans les courbures qu’elle impose. La seconde voire la troisième sera son siège. Pour ce soir, il jouera sa partition en talonneur entre nos deux piliers.
Nous arrivâmes au trou pour lâcher la pression. Les anciens sont dans le passage en direction de la table. C’est l’heure des chassés croisés propices aux sports d’hiver. L’allée était classée en noir par le castor futé. Les intrépides trouvèrent tout de même la source. Après le hammam, la bière est un plaisir. Notre religion nous l’impose. Dudu termina le pot de pâté, servi en tapas pour les beloteurs. Il adore tremper ses toasts dans son jaune comme il aime prendre la douche les pieds secs. L’homme est ainsi. Le pot vide, nous rejoignîmes les affamés de l’horloge et Pépé en gardien du temple de la bouffe. Les places sont toutes à table. Le chassé croisé est ainsi, lorsque les vacanciers sont sur la route nul ne skie. C’est pareil au trou. La table nous accueille en son sein.
Les couteaux grincent. Le cuistot envoya sa salade. Une salade contre nature. Elle sentait bon les vacances. Non celles du ski mais bien de l’été à venir et des îles à découvrir. Le bronzage de Piou Piou travaillé en Afrique brillait en harmonie. Un mélange d’avocat, de tomates, de salades nous fit oublier la pluie. Les castors aiment la mise aux verres. Jean Phi se leva à multiples reprises pour éponger la troupe. L’assaisonnement trouva bonne mère et Jacquot son vinaigre. Dudu est sur le coup. La resserve est sans réserve. Jeff comprit l’appel. Les coups de reviens-y ont mis la salade en péril. Les renforts se feront en pâté. Dudu en profita sans jaune, le rouge étant de sortie. L’entrée est colorée. Puis vint le temps de la suite, c’est une constante. Jeff est amateur de pâte. Il est en stage, les générations se suivent et les carbonaras rassurent. Un rappel wikipédien est de circonstances pour alimenter le trou, l’apport webien n’est jamais de trop. La recette traditionnelle fait l'objet de plusieurs variantes, mais les bases sont toujours les œufs (ou parfois seulement les jaunes d'œufs), les lardons (pancetta ou guanciale), le pecorino romano (fromage de brebis sec) et le poivre noir fraîchement moulu. Les variantes utilisant de la crème fraîche sont parfois dénommées carbonara ricca.
La région du Latium a toujours revendiqué la paternité de cette fameuse recette, mais l'origine réelle de ces « pâtes à la charbonnière » est en fait très discutée et plusieurs versions plus ou moins fantaisistes circulent. Selon la plus répandue, le nom de la recette proviendrait des Carbonari, membres d'une société secrète à vocation politique créée au début du xixe siècle. Mais le rapport avec la pasta est en fait assez flou. Selon une autre version, les inventeurs du plat seraient les charbonniers italiens (carbonari) qui passaient le plus clair de leur temps dans les forêts des Apennins à fabriquer du charbon de bois et auraient mis au point un plat de pâtes unique et roboratif avec les produits les plus facilement disponibles en montagne : des œufs, du lard et du fromage. Une troisième version est plus simple : les pâtes, largement saupoudrées de poivre noir, auraient dans l'assiette une certaine ressemblance avec le charbon (carbone).
Les carbonaras sont faites pour les codes du trou. Il faut bien que jeunesse et le rugby se fassent.
Le 1er lancer pour le jeune castor en formation est maintenant nécessaire. Il succède à Pépé et la pression est sur ses épaules. L’homme en retraite a montré à ses jeunes que la technique n’est rien, seule la qualité de lanceur se sublime dans l’expérience. Après 15 ans de lancer modéré, le sacrifice de 4 assiettes est ridicule si nous le resituons dans l’échelle du trou. « Tout est relatif » s’exclama l’ancien. « La relativité et le trou n’excuse pas la chute d’une assiette… point de trou noir et d’étoiles qui tiennent … ». Une faille jaillit dans la solidarité intemporelle de nos porteurs de bérets. L’assiette en Ariège est comme le cochon, elle est sacrée !
Jeff a la pression sur ses épaules. Il la joua prudent. Piou Piou donna le tempo. La cadence est douce, les lancers courts et sûrs pour le receveur. Point de chute pour le cuistot, son compteur reste vierge.
Pour la voie lactée, nous eûmes une farandole de fromage du coulant au moins coulant.
L’homme offre du bon. Puis vint une salade, point d’entrée qui se fait sans une bonne sortie. La salade cette fois-ci est de fruit, joli, joli… Saint Mammet sera son sein protecteur. Point de salade sans son sein ! Un cake chocolaté pour accompagner et les troupes se regroupent pour le café.
Le get compensera l’absence de patxaran. Les hommes se sentent chanceux et se lancent aux hasards des dés. Les cartes sont distribuées. Les hommes annoncent. Le Trez finit ses comptes. Le clown de jeu a un dé à deux faces celui d’un comptable et d’un joueur. Les duels opposent et rassemblent. Le Trez cumule et nous bluffe. Jacquot suit et essuie les tours des autres. Stéphane débute et prie son neuf. C’est une constante du trou, point de vin sans son neuf.
La porte nous dissimule de la nuit. Nous l’entrouvrîmes pour rejoindre une vie plus citadine. Les castors repus levèrent leur nez pour d’autres étoiles. Chacun vers sa constellation de destinée, les hommes s’enfoncèrent à pattes ou en vélo dans les chemins promis de leur nuit.