22 octobre 2012

Le cuistot de la semaine, le Saint-Esprit


Par Le Barde


Les scooters en rang d'oignons garés devant la grille de Musard augurent de la présence de Walid, Titi, Jérôme... Musard n'est pas Rome pour autant. Pas de Vespa. Par contre, il y a le petit scooter de Jérôme, celui plus traditionnel de Walid et le gros scooter à deux roues de Titi, engin hybride s'il en est que Titi chevauche avec une classe rare, un peu comme Nanni Moretti dans Journal intime. Il y avait un quatrième scooter ; j'en ignore le propriétaire. Pas de motos, par contre. Lolo revient à peine de Chine et Peyo, crachin oblige, avait pris sa voiture. Pas de Croucrou non plus. Croucrou, il était à New York avec un autre Éric (pas moi, Léonard). Il y croisa Sarko faisant son jogging, posa pour une photo souvenir et lui dit : « Elle va bien la petite ? » Croucrou sait parler aux grands de ce monde. Quant à l'autre Eric, il faut l'entendre parler de Manhatan, la voix nouée par l'émotion : « Putain, c'est grand, c'est grand New York USA ».

Retour au pré. Toujours autant de maladresses. Surtout dans l'équipe à Guitou. De beaux essais dans l'équipe à Jean-Phi qui foulait de nouveau l'herbe chiche de Musard après ses petits tracas de cheville. L'ambiance était bon enfant. Quelques râles émanaient ça et là de corps en détresse, ceci compensant cela. Peyo, quand il ne vient pas en moto, il courre plus vite. Mardi, il était particulièrement véloce et triomphal. Pas Yannick, mais ça viendra. Moi, je m'ennuyais, rêvant au cassoulet du toulousain. Et du cassoulet, il y en eut. J’y reviendrai.

Pourquoi bordel oppose-t-on les deux cités de la Garonne ? Le Toulousain, il va de soi dans la cité de Montaigne. Bon d’accord, il a son accent. Mais un accent, c’est comme un acte de naissance, une marque de fabrique. Et puis qui n’a pas d’accent n’est pas toulousain. D’ailleurs, ce n’est pas Bordeaux qui a mis à mal le XV de la ville rose mais une banlieue de cheminots, de morutiers, de maraichers : Bègles bien sûr. Et ce en 1949 (coupe de France), 1969 et 1991 (Brennus). Ne m’en veux pas Guitou, l’histoire s’est écrite ainsi. Mais tu peux te rattraper avec ton vieux stade, il fut le premier à damner le stade Français. C’était avant l’avant-dernier siècle. 

Le toulousain commença soft. Le plus lourd était devant nous. Et il y alla de sa petite salade. Philippe c’est un sensible, un tendre. Il sait les préliminaires végétaux. Alors vint le cassoulet, celui dont je rêvais lorsque je m’ennuyais sur le pré attendant l’improbable offrande de mes partenaires. Un petit cours sur le cassoulet.
La légende, rapportée par Prosper Montagné, place l'origine du cassoulet dans la ville de Castelnaudary, durant la guerre de Cent Ans (1337-1453). Durant le siège de Castelnaudary par les Anglais, les assiégés affamés auraient réuni tous les vivres disponibles (haricots secs et viandes) pour confectionner un gigantesque ragoût ou estofat pour revigorer les combattants. Ceux-ci purent alors chasser les Anglais et libérer la ville. Cette légende qui conforte le sentiment nationaliste et fait du cassoulet un défenseur des valeurs françaises ne résiste cependant pas vraiment à l'analyse. Certes la ville de Castelnaudary a grandement souffert pendant la guerre de Cent Ans. Elle fut d'ailleurs partiellement brûlée par les troupes du Prince Noir le 31 octobre 1355. Cette légende reflète ainsi le désir de prendre une revanche sur l'histoire. D'autre part, les haricots, originaires du continent sud-américain, n'ont été introduits en Europe que beaucoup plus tard (XVIe siècle), il s'agit donc plus probablement de fèves ou de doliques (moujette ou mounjette en occitan) qui étaient consommées à l'époque en ragoût.

Le cassoulet, qui s'appelle encore au XVIIe siècle estouffet, prend au XVIIIe siècle, le nom de cassoulet du nom du plat dans lequel il mijote, la cassole. La querelle sur le pays d'origine du cassoulet apparaît dès la fin du XIXe siècle quand la revue méridionale publie en 1890 un article affirmant que le seul cassoulet authentique vient de Castelnaudary. Anatole France appuie cette version quand il écrit « II ne faut pas confondre le cassoulet de Castelnaudary avec celui de Carcassonne qui est un simple gigot de mouton aux haricots. ». La question se nationalise vers 1900 quand le critique gastronomique Edmond Richardin lance un débat sur ce sujet dans la gazette parisienne. Chacun prend alors parti pour un pays (Castelnaudary, Carcassonne, Toulouse) en oubliant l'existence de versions locales comme Villefranche-de-Lauragais, Narbonne, Montauban, Pau ou Pamiers. En 1911, Le cassoulet est chanté par le poète félibre Auguste Fourès qui retranscrit un chant anonyme de 1850. Ce plat s'invite sur la table de l'Élysée par le biais d'Armand Fallières.
Il est l'objet d'une querelle ancestrale entre trois villes : Castelnaudary, Carcassonne et Toulouse. La controverse porte sur l'origine du cassoulet, sa composition et les qualités gustatives des cassoulets préparés dans chacune des villes.
Le cassoulet de Castelnaudary est fait à partir de haricots blancs du Lauragais, il contient du confit d'oie, du jarret ou de l'épaule de porc, de la saucisse et de la couenne de porc, une carotte, un poireau et une branche de céleri. Il finit sa cuisson dans un four de boulanger dans lequel brûlent des ajoncs de la Montagne Noire. Le cassoulet de Carcassonne peut contenir de la perdrix rouge et un morceau de mouton. Le cassoulet de Toulouse contient du confit de canard et une saucisse de Toulouse, de la carotte et de l'oignon. On le recouvre parfois de chapelure avant de le passer au four. Le nombre de fois où il faut durant la cuisson au four, casser la croûte qui se forme à surface du plat est l'objet de grandes querelles d'experts (entre 6 et 8 fois selon les versions).
Pour arbitrer cette rivalité, Prosper Montagné (Carcassonne, 1865-Sèvres, 1948), un gastronome languedocien devenu cuisinier à Toulouse, a recours à une métaphore :
« Le cassoulet, c'est le Dieu de la cuisine occitane ; Dieu le Père, c'est le cassoulet de Castelnaudary, Dieu le Fils c'est celui de Carcassonne et le Saint-Esprit celui de Toulouse. »

Donc le Toulousain, c’est le Saint-Esprit. On le savait. Mais un Saint-Esprit sans carottes. Quand il lance les assiettes, Philippe, c’est un ange noir. Le trou ne fut que fracas. Les assiettes sifflaient dans tous les sens ; nous étions tous aux abris. Guitou tança le Toulousain qui n’en avait cure. Le cassoulet, ça donne des ailes. Ce qui, on en conviendra, n’a rien d’évident. Sauf pour le toulousain. Normal pour un ange, fût-il noir. Après le fromage, il nous offrit une salade de d’oranges. Retour à la délicatesse de ses  débuts. Philippe, il est mi-ange mi-démon. On l’aime sous ses deux versions. Rien de plus authentique que notre Toulousain. Et c’est pourquoi nous chanterons sans fin son cassoulet. Dire qu’il avait attendu tout ce temps pour nous le livrer. A Walid de nous la jouer sur le même tempo côté Liban. C’est pas pour tout de suite. Abécédaire oblige. On attend avec impatience.

1 commentaire:

Perdigue a dit…

Prosper,c'est le grand-père de Gilbert ?????