19 octobre 2016

Le cuistot de bouffe : Patrick...avocat ce rôle de cuisinier...

 Par Le Barde et Bardatruc
 
 

Le monde moderne est difficilement franchissable. Il se dit open, avec sa manie d'angliciser tout ce qu'il touche : open source, open data, open office... Et pourtant, il abuse des barrières. Musard n'échappe plus à la règle et pour rejoindre terrains et vestiaires, il faut se garer à l'ancienne. Les barrières, peut-être, sont une invitation à recouvrer les chemins d'antan ! N'empêche, l'accessible demeure le plus sûr chemin pour aller à l'essentiel. Ainsi parlait Pioupiou comme nous regagnions les vestiaires pour glaner dans nos sacs nos habits de lumière.

Nous dûmes jouer sur le terrain annexe. Le synthétique était vierge de lumières. La modernité décidément nous jouait de mauvais tours. Valéry a raison : "Le moderne se contente de peu." Ces aléas ne furent pas pour rien dans l'approximatif de notre toucher. On connut des soirs plus alertes et moins revêches. Toutes choses qui ne nous dispensèrent pas de jouer à la baballe. Mais, ce fut couci couça. Le ballon chut plus que de raison. Une soirée d'automne sans panache qui eut le mérite de nous dégourdir les jambes. Il est vrai que sans le Tarbais, le toucher est veuf. Mais laissons la parole à notre Bardatruc puisque le Bardibule n'est pas de blog cette semaine.

Quel entraînement mes amis !
Au royaume des ballons tombés et des passes pour personne, le castor était roi ce mardi ! Un vrai spectacle, une école de jongleurs manchots colombiens sous cocaïne, les septs nains ayant eu les faveurs orales de Blanche Neige.
Comble du hasard, mon grand ami Serguei Ivanilitch, proctologue et conseiller en politique internationale de Vladimir Poutine, les deux spécialités étant finalement assez proches, m'avait prêté un système appelé HawkEyeForRugbyDummies, en français Œil d’aigle pour rugbyman en délicatesse… Derrière ce nom barbare se cache une technologie pointue qui permet de suivre la beuchigue au millimètre et d'en déduire s’il y a en avant, passe de maçon, etc. Et bien sûr, grâce à la reconnaissance faciale, l'application est capable d'associer la cagade au joueur et vous restitue à la fin de l’entrainement, d’un simple claquement de doigts, les statistiques tant appréciées des gens qui ont une calculatrice à la place du cœur. Cela n’existait pas du temps de Poitrenaud et Beauxis, ces deux joueurs étant arrivés les deux premiers d’un top 5 mondiale des cagades tout de même ! Oups, quelqu’un me dit que Lionel joue toujours et à l’UBB, nous permettant d’éviter avec talent les phases finales oh, enquie.

Bref les résultats d’hier sont stupéfiants, enfin auraient pu être stupéfiants. En effet, j’avais bêtement configuré le nombre max d’en-avant à 3 par personne ce qui représentait un potentiel conséquent de 60 en-avant(s). Vous me croirez ou pas, tout le monde ou presque a dépassé le seuil ! Aussi, nous n’avons que la certitude qu’il y a eu au moins 3 en-avant par personne mais le maximum ne sera jamais connu et heureusement d’ailleurs.

Cependant, tout n’a pas été noir. En effet, il restait une chasuble verte portée avec constance par notre maniaque vestimentaire de Titi. Que sont devenus les autres, probablement laissés dans la tente d’une hollandaise cet été au camping des flots bleus. Le gardien ayant laissé allumé l’annexe en herbe, nos genoux et dos ne furent pas mal traités. L’effectif de manchots était conséquent 10x10. La température encore douce.

Certains joueurs tirèrent malgré tout leur épingle du jeu. Notre Dudu enfuma les truffes en face de lui, Pioupiou affuta encore ses courses en se remémorant les consignes de quand il était à l’école…de rugby. Walid avait les cannes de Bolt. Hamilton, sous extasy, lacha une chistera croisée, comble de l’excentricité pour ce conservateur du beau jeu.

Cependant, tout cela aurait pu mal finir et n’oublions pas que le rugby est un sport à risques. Ainsi, Zeille, particulièrement volontaire, prit l’intervalle tête baissée et s’emplafonna l’épaule ou le coude de Jean-Phi : un choc de Titan. Pour vous donner une image de cette collision énorme et sans lien avec nos deux alcoolitres, on aurait dit un accrochage entre la suffisance de Juppé et à l’arrogance de Sarkozy. Enorme.

21h30 sonnait, il était temps de tracer car pire que la police, c’est l’avocat qui nous attendait. Et quand un avocat vous attend au trou …

L'avocat était de cuisine. Et fit un pied de nez à l'automne en nous servant une salade de tomates estivale en entrée. Une manière comme une autre de dire que la vie est belle. Hamilton avait pris la place du Tcho. Rien à voir avec la beauté de la vie. Encore que ! La beauté sans savoir-vivre est orpheline. Toujours est-il que les tomates filaient bon train dans nos palais. Avec cette pointe de persil qui ajoute le nécessaire pour que le goût soit d'abord mélange. Les conversations aussi allaient leur train. Diverses, variées. Guitou, assis à la droite du Prez, était aux anges. Ce qui, somme toute, n'est qu'évidence. "Tout ange est terrible" écrivait Rilke. Et bien, il se trompait. Il suffit de voir Guitou pour tordre le cou à ce vers. Mais Rilke ignorait tout du trou. Ses muses étaient plus pâles.

Le lancer d'assiettes fut audacieux. L'avocat n'y alla pas de mains mortes. Il ajusta les oboles en prenant une distance périlleuse. En sorte que le fracas fut de circonstance. Il n'y eut pas de fromage. Superflu après le couscous ! Un "Tiens voilà du bon fromage" sans vigueur sortit péniblement de nos gorges. Comme pour sacrifier à un rite. Quand le ventre est plein, le cœur n'y est pas. C'est un vieux proverbe de la renaissance paraît-il.

Jean-Phi enfilait les bons mots comme des perles. On aurait pu en faire une guirlande pour le blog. Ou un collier. Les bons mots de Jean-Phi mériteraient d'être conservés. Mais ma mémoire matinale est rétive et Jean-Phi ne voulut point du blog, de ces traces écrites qui contribuent à notre mémoire. Il n'est qu'à l'instant. Le trou est sa page. L'instantané son royaume. De l'art vivant et bien vivant.

Une délicieuse salade d'oranges conclut nos ébats. Il ne manquait que la corne de gazelle que Serge appelait de ses vœux, et c'est vrai qu'elle n'aurait pas dépareillé. Serge a l'âme orientale. Et son Tarbais lui manque. Son désir de corne était l'expression d'un manque. Walid, lui, goûtait l'orange comme l'on goûte un sonnet de Pétrarque. L'orange est son or. C'est alors que la Jacouille cita son Eluard : "La terre est bleue comme une orange." Pioupiou, la larme à l'œil, lui jeta un regard admiratif et ajouta que, oui, sa chanson était bel et bien monotone.

Une belote de comptoir clôtura la soirée. Et le Prez l'emporta. Les mardis se suivent et se ressemblent. Il y aurait une chanson à écrire pour bouter hors l'antienne pioupioutienne de manière définitive. La partie s'acheva sur un ultime duel entre Titi et moi-même. Et Titi l'emporta. Gros Jean comme devant, je sortais du trou, l'âme en peine, et, consultant les étoiles, je cherchais la promesse d'un sort meilleur. Jacky me fit un clin d'œil. Je regagnais mes pénates le cœur léger. Nous sommes d'une lignée, l'avenir nous appartient.

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