20 mars 2018

Le trou du cuistot : Trois doigts coupent faim!

Par Le Barde, Bardibule et Bardatruc


Le pré existe-t-il ? Ne vivons-nous pas dans l’illusion du pré ? On croyait être et l’on n’est pas ou plus. Que le pré soit d’herbe ou synthétique, peu importe. Il ne reste parfois rien de ce que nous fûmes.

Je ruminais des pensées noires comme je rentrais penaud au vestiaire après une rouste mémorable. Le pré est le miroir du temps qui passe me disais-je. Ce sentiment était accentué par le fait d’avoir emprunté pour un soir le terrain où le rugby, alors, était d’or. Je veux parler du terrain annexe qui n’avait rien d’annexe lorsque nous brillions de mille feux. La présence de Gwen accentuait-elle cette mélancolie printanière ? Ou l’absence de mon pinson ? Je ne sais pas, je ne sais plus.

Le vestiaire était pourtant alerte avant la bataille. Rien ne laissait présager une telle déroute. Jean-Phi chantonnait l’italiano. Il y allait de son Lasciatemi cantare. Pourquoi, pourquoi ce laissez-moi chanter ? Comme s’il avait les ailes rognées. Toutes choses que le pré allait démentir. Moi, prémonitoire, j’y allais de mon Avec le temps. Si j’avais fredonné C’est extra, les choses, pourquoi pas, auraient connu un autre cours.

En effet, pour des raisons obscures, Bergonié était noir. Et quand on dit noir, c'est noir, n'en déplaise à notre expert national en fiscalité patrimoniale Johnny.
La mairie nous proposa donc un retour à la terre, mais comme disent les Fatals Picards, poètes trop méconnus mais vivants : "Elle est pas belle la vie pour le dernier des hippies !".

En effet, est-ce la rosée du soir ou le coup d’œil lubrique de Zeille, mais la balle fut humide toute la soirée. Nous eûmes donc droit à un festival de ballons tombés. Au risque de filer la métaphore, ce fut carrément Woodstock et ses plongeons transgressifs dans la boue interrogeant sans détour l’utilisation de lessive avec phosphate ! A l’époque, le chat n’existait pas, la drogue par contre...

Le Barde goûta assez peu le spectacle, on peut même le dire, il péta les plombs laissant échapper une petite crise d’autorité toute Macronesque. Celle-ci arriva à son apogée lorsque contredit par un Dudu goguenard, il balança : « Tu croives que tu m’ touches, mais j’m’en bats les coui…Maintenant, c’est moi car bite !» Ah, quelle fougue dans le verbe…

Sa prose à la première personne démontre combien les stigmates profonds creusés la veille ne pouvaient guérir que par cette catharsis bloguesque.

Le fait de match fut incontestablement l’essai de Jean-Phi qui slaloma au milieu de l’équipe de Hippies totalement défoncés incapables du moindre pas.

L'ensemble fut moyen pour l’équipe dominante et abominable pour l’équipe dominée.

Heureusement, certains prirent le parti d’en rire voire de se pisser à la culotte tant les jets de certains, car il serait indécent de parler de passes, étaient vilains. Pour rappel, nous jouons Mercredi prochain contre Dassault, ce qui nous impose de faire décoller notre niveau actuel. Et si ça marche, jouer contre Ariane ne serait pas de trop !

Arnaud, qui était ce Arnaud devant officier en maître queux ? Ni maître, ni queux en l’occurrence. Rien que l’absence. L’absence ce n’est pas rien mais ce n’est pas grand-chose, n’est-ce pas. Point de Arnaud. Le vide. Un mirage.

Gwen en parrain du vide fit acte de présence essuyant quelques critiques du genre : « Quelle idée de parrainer l’homme invisible » ou « Ton prochain filleul, c’est Hollande ? ». Mais quand il n’y a personne, la Jacouille est là. Jacouille devient l’absence en personne. Avec le vieux quatre à ses trousses. Le vieux quatre, il déteste le vide. Point de manque donc et nous pûmes dîner. Avec un repas de bric et de broc certes, mais un repas quand même. En entrée, de la charcutaille que Pépé lorgnait d’un œil rouge. La faute à une opération de la cataracte. Son œil opposa quelque résistance au laser. Notre homme a le cuir bien trempé.
La boite à pizza a bon dos face à nos mauvaise mines. Le masque à double facette. Tragediante Comediante...Ionesco aurait ri du drame et Croucrou l’aurait traduit en langages des cygnes restant muet sur le sujet. Le rire est universel, la déception aussi... Mélodrame de la bonne bouffe. La complainte du lapin au Nebraska. La névrose du talonneur en papillote. Les présents râlent et les absents ont toujours tort ! La règle du trou est bafouée. Pas de pizzaiolo au trou ! Les castors les préfèrent sur le pré. « La pizza ça me décoiffe » souffle Piou Piou tout feu tout flamme. L’homme envoie du gaz et se décarcasse pour nous faire grossir au risque de se voir maigrir. Le don de soi est là. Il nous alimente sans compter en véritable traiteur intraitable qu’il est. Et là, lapin! Le castor n’aime pas le lapin. L’animal n’a pas de queue plate et bouffe sa carotte en solo. L’évolution a des règles dont le lapin se fout ! Déjà que sur le pré les calzones volaient bas. Le renouveau du printemps attend du bon et des rebonds. La névrose du talon se lamente de son estomac. Du coup rien à dire. De la pâte, de la tomate et tout autre artifice substantif agrémenté de fromage. La vache fait chier le lapin ! Même Dudu perd de sa couleur et pourtant la radio côté négatif, il s’y connait ! Le castor bronzé pâlit sur le sujet, limite un lapin aux olives et encore...

Le lancer fut confié aux vieux 4. La tragédie est ainsi elle n’a pas de limite dans le désespoir. Le vieux 4 est un vrai nostalgique de la balle plus rattrapeur que lanceur. Sa spécialité: la bonne réception, calzone en tête. Autrement nous l’aurions surnommé le vieux 9 ou le vieux 10 même si le gabarit ne ment pas.

Trop de tragédie devient une comédie. Les castors rigolent et ça c’est bon !

Jean-Phi se protégeait. Il se baissa et se servit du corps de Gwen pour opposer une résistance au lancer du vieux quatre. Il n’eut pas tort. Il y avait des relents d’apocalypse. Quand le vieux quatre se mue en Arnaud, le désastre est là. C’est comme ça. Hamilton le regardait d’un œil sévère. Et de crier : « Sors de ce corps Arnaud ! ». Rien n’y fit. Le vieux quatre n’était plus lui-même. Il était comme fou. A chaque lancer il criait poule. Le lancer d’assiettes avait des allures de ball trap.

Pas de salade.

Pas de dessert. Heureusement que Titi avait fait le plein cancoillote la semaine dernière. Heureux les pinsons amis des castors !

La belote de comptoir se joua à sept et fut exceptionnelle car elle permit à notre Barde de reprendre goût à la vie. Toujours tendu, il démarra la partie par une baraque percutante laissant Cambot sur le cul. Les affres du terrain s’étaient dissipées pour notre Barde qui sortit vainqueur suivi du Bardibule. Les gens de mots avaient pris le dessus. Fayou papotait avec Hamilton et Gwen.

La nuit était douce, étoilée, pure comme une photo d’Hamilton. Le printemps montre le bout de son nez. Ma mélancolie s’effaçait. Il y a des soirs avec et des soirs sans. A quoi bon rouler des pensées tristes. Me revinrent ces mots d’André Breton dans L’Amour fou : « Tourne, sol, et toi, grande nuit, chasse de mon cœur tout ce qui n’est pas la foi en mon étoile nouvelle. »

Aucun commentaire: