Par Le Barde et Bardibulle
« Mais putain on est où ? » s’écria Pioupiou. « Sur le pré, à Musard » lui répondit Perdigue d’une voix très douce. « Ce n’était qu’un mauvais rêve, ne t’inquiète pas mon Pioupiou ». Pioupiou regardait à droite, à gauche. Ses mouvements de tête s’accélèrent. Il nous fit le père Abraham avant l’heure. Le doc s’inquiétait. L’heure du trou et l’heure du pré ne sauraient se confondre. Et c’est précisément ce qui l’inquiétait. Titi se rapprocha, poussa de tendres trilles pour adoucir le fils de Jacouille. Rien n’y fit. « Tu veux une goutte de Sabite ? » lui demanda Jean-Phi. Planté sous les poteaux, Pioupiou poursuivit sa danse. De guerre lasse, chacun se mit au jeu. Mais le cœur n’y était pas.
La partie se traîna. Pioupiou était désormais sur le dos, battant l’air de ses quatre membres. Hamilton demanda une pause : « Il y a quand même un problème » et l’index posé sur son nez aquilin s’adressa au ciel. « Ce n’est rien, un vulgaire choc post-traumatique » lui confia Grozan. Tout rentra dans l’ordre. Pioupiou récitait son chapelet, Seb et Sergio leur rugby.
On entendait assez distinctement les oiseaux. Quelques mouettes nous donnaient le goût du grand large. Gwen se sentit pousser des ailes. Et Dudu des cornes. Peu à peu, le jour déclina. Il fallait rentrer au bercail. Alors Pioupiou poussa d’amples mugissements. La vache au taureau suppléait le père Abraham. « Bientôt on sera au trou, et tout ira mieux » murmura Christophe à l’oreille de Pioupiou.
C’est Jean-Pierre qui régalait. Lorsque Pioupiou descendit l’escalier, il chanta mon truc en plumes en se dandinant du postérieur. « Tu te prends pour Zizi Jeanmaire ? « lui demanda Pépé. Pioupiou n’en avait cure et poursuivit sa danse. « C’est qui Zizi Jeanmaire ? » susurra Peyo. « Ignorant » lui répliqua Pépé.
Jean-Pierre avait un beau tablier noir. Avec Audrey Hepburn en son sein. Il roucoulait. Une manière comme une autre de répondre à Pioupiou. Le Tcho sifflotait debout sur son tabouret. Oui, il y avait comme un air de printemps. Et Lolo récitait son Britannicus en pensant à sa Caro.
Pépé sonne l’horloge. L’effet est garanti. Les castors s’installent. L’art est individuel dans le principe de précaution. L’analyse est donc de rigueur. Nous pouvons catégoriser les castors en quatre catégories. La première et non des moindres et le castor « Met-y culeux ». Souvent emprunts d’expérience, repérables à la couleur de ses poils. A ce sujet je propose de lire le fabuleux article sur le sujet dans cerveaux et psycho de la semaine. Stress et poils blancs. Le béret est un leurre met reste un identifiant comme les autres sur la question. Il choisit son tabouret, observe le caractère sec de l’assise pour préserver la sienne. Agence ses couverts, attrape un couteau et découpe méticuleusement la nappe en papier de 10 cm de part et d’autres de sa largeur. Rassuré, confiant le voilà enfin disposé à se suce tenter. Le deuxième reste dans une lignée préventive, en brin frivole souvent repu de ses allers et retours sur le pré. Gwen l’envisage entre une dynamique statique et un mouvement immobile. Bref, un méticuleux sans précision. Il arrache une bande grosso modo à la largeur de sa queue plate, un regard si Jacquouille est dans le coin puis il s’assoit avec le tabouret qui traine. Le hasard fait bien les choses, il garde le cul sec. La logique les qualifierait de « pré-Met-y culeux ». La troisième catégorie des castors bien confiante pour l’occasion « Rooh, j’ai bon temps ». Le soleil ne préserve pas de la pluie. Mais L’insouciance est une préchambre de liberté. Les castors « roger-bontemps » se vivent le cul sec ou mouillé. L’anticipation, ils s’en branlent. L’art de la rigole est laissé au hasard des autres. Un bonheur pour les arroseurs. L’invité fait pigeon et la carpe son castor. Plus la rigole est longue et plus c’est bon. La formule se prête à tout. L’opportuniste gardera un pichet remplit d’eau. Il est rare de le remplir avec du punch. Sauf pour Prof. Un baptême en son trou. La quatrième génération restera au coin du bar. La nappe ne se découpe pas dans le coin. Chaque place ayant sa queue. Un mélange d’amour, de réflexion et de bar. Nous les classifierons en tant que « philobar ».
La catégorisation est légère mais reflète d’une certaine manière les comportements de prévention pour garder le cul sec.
Cary Grant sur le sujet ne craint hier il garde le bout. Son entrée une éloge au printemps. Les couleurs d’une salade qui prie le renouveau. La délicatesse est dans une découpe méticuleuse à ne pas confondre avec l’assise. Des tranches de tomates savoureuses, gigantesques pour la saison. Charnues à souhaits. Sel de guérande et vinaigre de Jacquouille en surface. Simplicité et l’art du bon vivre. Mozart est là. JB en aviateur est sur le tarmac et profite de la table. Mozzarella entre chaque tranche de tomate. Des feuilles de basilic du marché du capucin en découpe. Les papilles sont aux anges. Des petites tranches de pains grattés à l’ail et une trempette d’huile d’olive. Piou Piou garde le silence. Il ne parle pas la bouche pleine.
Le plat sera dans la continuité un poulet farci. La recette de la farce est sur le groupe Whats’app. Elle se joue à 8 centimètres près. Le gel hydro-alcoolique est fixé à l’entrée de la cuisine. Doc sort en tenue de chirurgien. L’actuel se veut désinfecte. Il fait des va et vient. Il participe au fourrage. Son sens de l’éthique lui interdit d’abandonner ses paires. C’est Peyo qui se chargera de l’annonce. La poule est farcie. Doc soulagé prend Jean Pierre dans les bras, « Tu vois l’union fait la force. » Combler la poule pour le doc est une thérapie « cul y nerf » pour combler le temps. L’important de ne pas penser au titre. L’équipe est si belle. « Jean Pierre je pense qu’on peut rajouter de la farce ; tant que cela rentre on met… scalpel ! » . Peyo visionnaire s’échappa de l’antre, voyant que la poule ne pourrait contenir toute la farce et l’énergie de notre doc en trance. « Les gars il faut servir ! »
Les légumes une purée. Quitte à broyer du noir autant que cela soit des patates.
Le lancer d’assiettes ne fut que douceur. Perdigue avait enserré le corps de Pioupiou dans des cordes et clôt son bec, en ajoutant à son chef une plume d’autruche. Nos mains se tendaient graciles. Ce fut un instant de grâce. Même le vieux quatre n’était plus que langueur. Pioupiou se débattait sous l’œil courroucé de Jacouille. Pas un son ne sortit de sa bouche bandée.
Point de belote. Nous chantâmes. JB avait apporté sa guitare, Joël sa trompette et l’Amiral son biniou. Le Tcho et Titi accordaient leurs trilles. Rien de monotone. Au désespoir de Pioupiou qui se débattait et gigotait en vain sur son tabouret. Le Prez était à la baguette, avec un je ne sais quoi d’Ennio Morricone.
La nuit nous prit sous son aile comme nous sortions du trou. Une aile protectrice et tendre. JP regagna son Bassin l’âme tranquille et apaisée. Son Audrey l’attendait.
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