Par le Blogger et le Barde
Tout a commencé comme ça.
Sur le parking d'Aire-sur-Adour, juste à gauche du pont, là où l'Adour coule paisiblement en offrant aux promeneurs de beaux accouplements de canards dodus, une dizaine de vieux sportifs défient l'âge et le temps, attroupés autour d'un autel en ciment offrant aux Dieux la vie d'un boudin boursoufflé et un lot de bouteilles de rouge. Dans la plus pure tradition des pèlerinages sacrificiels, ils furent transportés par un bus d'un faste indécent. On aurait pu faire plus sobre ! Quelques minutes plus tard, il furent rejoints par d'autres venus en trombe et en voiture, pas même le temps de dépanner une autostoppeuse !
Toute la journée se résume à cette instant, là, comme une annonce aussi limpide que celle faite par Gabriel à Marie. Mais nos yeux aveuglés par la proéminence de la charcuterie escassutienne n'y ont rien vu. Kiki emplissait les coupes en disant à qui veut l'entendre : Ceci est mon vin ! et Dudu les vidait en louant les cieux entre deux rondelles : Emmèèèèèène ! Il faut dire que la charnière s'appliquait déjà à se faire des passes, Kiki à extraire la bouteille de la mêlée et Dudu à travailler les combinaisons, les placements, les attaques, un coup à droite, un coup à gauche, une sautée 1, une sautée 2... tout a été revu méticuleusement. Jusqu'à ce que Dudu se retrouve là, venant de l'autre côté de la table, guidée par une voix que seul lui entendait, ceux qui l'ont observé pourront dire que d'une façon inexpliquée et inexplicable, il fit le tour de la table pour se mettre à côté du Blogger (c'est moi, mais j'essaie de prendre du recul pour mieux comprendre ce qui a bien pu se passer !). Alors, il se passe soudain que tout d'un coup subitement, sur une réception d'un verre ou d'une lampée de breuvage (seul Dieu le sait), Dudu se fourre un de ses doigts crochus dans le verre avec une compulsion mystique et bascule le contenu de celui-ci dans une mystérieuse apesanteur. Le liquide jaillit dans l'espace et toute les gouttes viennent attérir, comme aimantées par une force invisible, sur la chemise du Blogger (c'est moi, mais je ne m'y fais pas !). Pas une goutte, vous m'entendez, pas une goutte n'a atterri ailleurs, pas une goutte sur le fringuant Dudu, pas une goutte à sa droite, ni en face, toutes les gouttes, toutes sont bizarrement parties directement vers la gauche. Ahuri, effaré, je me demandais ce qui a bien pu faire qu'une succession d'événements ait emmené Dudu là, ici, à ma droite, pour accomplir une chose qui aurait pu se passer une minute plus tôt, deux mètres plus loin... mais non, c'était écrit ! Dudu, au summum de sa maladresse, devait ce jour-là renverser son verre de vin de la sorte !!
Bon.
Nous sommes repartis en se disant qu'il y a là un signe, une annonce, un préssentiment, un présage de ce que la journée nous réserve. Ce qui était vrai ! Mais nous n'en étions pas encore complètement sûrs...
Encore sous le choc, j'en appelle au Barde pour finir ce compte-rendu ! Le Barde s'y attelle et voilà ce qu'il en dit :
A neuf heures, ce samedi 31 octobre, douze castors attendaient un bus improbable qui ne se décidait pas à venir. La raison : une inversion. En effet, le bus des castors avait opté pour les contemporains de la tortue et se trouvait à Musard pour embarquer l’équipe de l’Union. Ainsi, les castors partirent pour Pau dans le bus de l’Union. Vous me suivez ? Peu importe, cela n’eut aucune influence sur l’issue des matches : les deux équipes prirent une branlée. Nous y reviendrons.
Douze castors dans un bus, c’est peu. C’est trop peu. Ca frise l’indécence, ça fait grand luxe. Ca fait bourgeois. Le castor s’embourgeoiserait-il passé la quarantaine ? D’autant qu’ils ne furent que six à le prendre (le bus) le lendemain matin. L’esprit communautaire se perd. Pire, un bon nombre d’entre eux ne firent pas l’honneur de leur présence lors de la traditionnelle réception d’après-match. Là, ça fait vraiment désordre. Pourtant, nos amis palois nous reçurent à merveille. Mais les quelques présents avaient un peu les boules. Que voulez-vous le castor est grégaire, il a l’esprit de bande. Alors quand la bande se délite, le castor, il ronchonne, vitupère, peste contre ses semblables qui ont un goût prononcé pour l’automobile, goût frelaté par ces temps de développement durable.
La faute à la branlée qu’ils prirent à Lescar contre des archis palois d’un niveau qui leur était nettement supérieur ? Je ne sais. Les branlées forment le castor, et il faut avoir l’esprit altier jusque dans la défaite. C’est sur le score sans appel de six essais à un que les petits de Loulou connurent la défaite. Ils furent transpercés des minutes durant par des palois particulièrement inspirés à l’arrière. N’importe, les grandes équipes se forment dans la défaite et l’on verra ce que l’on verra à l’avenir. Nos jeunes pousses ont appris, nos jeunes pousses ont mûri. N’est-ce pas Donatien et Arnaud ! Laissons, ici, la parole à l’évêque de Meaux, au divin Bossuet, qui dans son Panégyrique de Saint Gorgon écrivait : « Toutes les histoires sont pleines de ces braves infortunés, qui ont eu la gloire de bien combattre sans avoir le plaisir de triompher ; qui ont remporté de la bataille la réputation de bons soldats, sans avoir pu obtenir le titre de victorieux. »
Il y eut une victime hélas : ce pauvre Jérôme, contraint de quitter les siens peu après l’entame : double entorse à la cheville. L’unique essai fut l’œuvre de Pascal Roumegoux qui ne vendangea pas l’occasion qui lui était offerte. A ce moment précis, les deux équipes étaient à égalité. Nous eûmes à maints reprises la possibilité de franchir la ligne lors de ce premier acte. Las, un en-avant, une passe oubliée nous contraignaient à faire fissa. Sans conteste, c’est Peyo, repositionné au talon, qui mérita le castor d’or. Peyo incarne à merveille la polyvalence propre au rugby moderne. Peyo, c’est un moderne, mais un moderne qui respecte la tradition : il passa ainsi la nuit avec ses rares comparses.
Puis, nous assistâmes, avant la grande débandade nocturne, à la rencontre Union-Pau. Les palois remportèrent une rencontre un tantinet ennuyeuse et durent à un hypothétique essai de pénalité leur victoire. Les palois qui soit dit en passant ont un public particulièrement casse-couilles. Le match fini, ils n’étaient plus qu’une poignée de castors à débuter une longue nuit. Les absents ont toujours tort, c’est bien connu. Après un repas dans une cidrerie, la soirée se prolongea aux limites d’une aube pluvieuse. Pas à dire, nos frères palois sont de vrais gentlemen nocturnes. Pau by night, cela vaut le déplacement si parcimonieuse soit l’assemblée des fidèles.
La nuit fut brève. Et les six rescapés revinrent dans leurs pénates by bus comme Ford (John) se rendit à Hollywood by train. Ils dormirent tout leur soûl après une ultime belote où le barde et Dudu laminèrent Kiki et Arnaud. On ne peut rien contre deux dix lorsqu’ils font la paire.
Match retour le 13 ou le 14 mars avec une réception à la hauteur de celle que nous proposèrent nos hôtes palois. Et méditons une dernière fois les paroles de l’évêque de Meaux : « Nous nous relevons de notre chute avec le même progrès pour lequel nous sommes tombés. »
Amen
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