21 novembre 2011

Les Archiball à Heidelberg : Tous saints

Par le Blogueur



On s’était posé beaucoup de questions avant d’y aller, c’est vrai. Certains regrettaient même le choix d’un week end de novembre en Allemagne voté au bureau avec des soupçons de délit d’influence. Responsable de ce choix, j’ai reçu beaucoup de reproches initiés et orchestrés par Gwen qui défendait la candidature de Barcelone. Suivront des menaces de tout genre, des intimidations, des brimades, des coups de fil pas si anonymes que ça… jusqu’à l’arrivée de l’Amiral dans l’équipe organisatrice qui a calmé les velléités du clan barcelonais.

Hélas, pas pour longtemps.

Pour d’autres raisons, les inquiétudes ont repris de plus belle. Voilà qu’on prend le train pour l’Allemagne ! Evidemment, avec ça, vas trouver des clients. Surtout que dix heures de train, on allait être tous fumés. Ne croyez pas que je fais dans les références historiques, pas du tout, quand je dis qu’on allait être fumés, on allait être fumés. Pas fumés comme un jambon de chez Escassut, non, fumés comme des barriques de vin. On allait être tous bousinés plus précisément.
Après des combinaisons easygwenesques – aller en train, retour en avion ; aller à vélo, retour en pédalo ; aller le dimanche, retour sous la manche… –, l’aller et le retour sur les rails sont adoptés. Rendez-vous donné par l’Amiral sur le pont de la gare Saint-Jean à 5h30 du matin. Le clairon pour rassembler les troupes fut sonné quand l’Amiral a bien voulu arriver, c’est à dire le dernier. C’est ça la Marine ! « C’est pas la marine cono, c’est Marien ! » Une question de « e » mal placé. Il faut comprendre que Gwen devait passer prendre l’Amiral et le Gwen en question est arrivé en retard. Quand on est bon, on est bon dès le début.
Si on commence comme ça, tous les mousses tiquent. Allignés dans le hall, l’haleine fraiche et puent l’ovaire, ils attendaient l’Amiral comme le Consul français d’Heidelberg.
Pioupiou demande quelle était la monnaie allemande, son papa, Jacques, demande si Heidelberg se trouve en Allemagne de l'Est ou de l'Ouest.
Jérôme veut s'assurer que la bière est toujours à 5,5 degrés (comme la TVA) ou si le gouvernement a appliqué une hausse (comme la TVA).
Kiki a lu que la taille moyenne de l'Allemande était de 1m71 : « C'est vrai ? ». Toto l’a rassuré, les femmes aiment aussi les petits.
Arnaud demande si : « Sorr Tenichon Kejtate » était de l'allemand ? Zeille aussi attendait la réponse.
Donatien veut savoir s’il fallait un maillot de bain pour patauger dans la mer Kel.
Thom ne veut rien savoir, comme toujours. Et moi, je n'avais pas de questions, parce que mes questions sur l'Allemagne ne servent généralement aryen.
Au bout du fil, JC demande si une rupture du tendon d'Achille était plus grave qu'une rupture du frein de Popol, parce qu’en fait il ne vient plus à cause d'Achille, et le Toulousain veut connaître la différence entre un berger blanc et un berger allemand étant donné qu'un allemand pure souche n'est pas noir.
Trop affolé pour répondre, l’Amiral s’est dépêché de mettre son monde dans le train. Tous dans un compartiment au fond d’une voiture où deux voyageurs s’étaient réveillés le matin même à la même heure que nous sans se douter un instant de ce qui allait leur arriver. C’est à dire : passer dix heures avec du jambon, du boudin, du pâté, du vin rouge et nous. SNCF, tout est possible.
L’Amiral s’est plaint qu’on lui manque de considération avec tous les efforts qu’il a fait pour nous dans sa collaboration avec les Allemands. On a voulu le tondre. Il a tiré l’alarme du train. 15 minutes arrêtés en pleine voie, 15 minutes de vin et de pâté.



Arrivés à Heidelberg, 13 archiball envahissent l’Allemagne en moins de deux. Direction le club des lions germaniques, on se retrouve spectateurs pendant 10 minutes d’un match de l’équipe locale. Match du championnat allemand en lever de rideau du nôtre.
L’échauffement se déroule avec une sono d’Édith Piaf « l'air de rien » et Desireless « voyage voyage ». Le doigt fait, le match démarre avec deux mercenaires dans nos rangs, un pilier et un ailier. Les Archiball se mettent à l’ouvrage avec dans les pattes, un réveil matinal, un transit ferroviaire et des litres de rouge. Et pourtant la magie opère. Les essais se succèdent et ne se ressemblent pas. Parfois à trois ou quatre en soutien, et parfois des envolées avec cadrages débordements et accélérations dans l’intervalle. Tout le monde ou presque a marqué son essai, même l’ailier allemand prêté plante le premier essai de sa carrière. On a du lever le pied sous la demande de l’arbitre maison pour leur laisser un essai ou deux, parce que le castor n'est pas chien.
Un match de deux mi-temps de 30 minutes chacune se solde par 11 essais à 2 en faveur des Archiball. Sans oublier de mentionner la pause bière parce que les oranges, là-bas, ne poussent pas.
La soirée qui a suivi est un festin à la gauloise. Un délicieux sanglier chassé par un rugbyman autochtone est passé à la broche, un succulent agneau fit de même, avec une soupe en entrée et un gratin de pomme de terre en accompagnement, le tout concocté tout bonnement par les femmes du club.
Nos deux Obélix se tiraient la bourre. Le plus fort s’appelait Thomières. Il en a repris sans compter. Le calcul n’était pas de mise. L’autre s’appelait Pioupiou, il a lâché la fourchette pour pousser la chansonnette. Arrosés par des litres de bière de blé, Abraham fête Mauléon. Jusqu’au Paquito, il n’y avait qu’un pas que tout le monde emboite avant de partir en boite. Pendant ce temps, le petit Donatien échappe à la surveillance et s’enfile les Jägermeister pour une longue nuit du chasseur. Very Bad Trip.
Le lendemain matin, ceux qui étaient partis en boite se retrouvent en bas de l’hôtel, celui qui est parti en sucette garde la viande dans le torchon et gamberge sur les 56 herbes qui composent la liqueur et toujours tenues secrètes. Il a rien percé, à part les chiottes.



Sans Donatien donc, et sans Perdigue reparti au labeur, les héros de Heidelberg partent à l’assaut du château de la Ville, symbole d'un romantisme du sud-ouest allemand taillé sur mesure de l’humeur qui flotte dans les vapeurs de la veille.
Si le général Mélac a bombardé deux fois l’édifice, c’est que personne n’a eu l’idée de lui dire qu’il y a là un tonneau qui contient 228 000 litres de vin qu’il serait dommage d’abimer ! Improvisé illico, notre guide de fortune nous emmène au musée de la pharmacie croyant à nos bons soins. Mais la médecine se trouvait un comptoir plus loin, dans les vins blancs de Württembergisches Unterland qui ont eu la mauvaise idée de se faire loin des mers ostréicoles.
Après la descente des bouteilles vient la descente vers la ville. On avait oublié qu’un funiculaire nous avait aidé à y monter. Arrivé en bas, la pépie envahissante et le gosier à sec, deux tables nous réunissent à merveille dans une brasserie typique de la ville, typique parce que la bière s’y fait et y coule à flot. Le maître mot était la bière et la bière fit taire nos maux. Choucroute pour tout le monde…
Ah qu’il est bon de verser et de converser la bouche mousseuse et l’estomac farci de choux. Sans ça, Zeille ne nous aurait jamais raconté la vie avec le grand Thom dans une chambre Ibis qui prend des allures de caravane. Sans ça, Pioupiou, camarade de chambrée de son papa, ne se serait pas rappelé le temps où le même papa le prenait dans sa chambre pour lui donner le sein avec un jambon comme doudou.
On aurait cru comme ça que l’après midi allait être un quartier libre, mais les chopines se succèdent assez vite pour tuer le temps. Il fallait vite repartir pour le rendez-vous Hockey sur glace, un match au sommet du championnat allemand. Le voisin Mannheim reçoit je ne suis plus qui…
Le groupe Archiball prend une nouvelle fois le train. Une demi-heure plus tard, nous voilà dans la SAP Arena de 30000 places avec un show à l’américaine qui nous a scotché comme des gamins devant un sac de bonbons. Les Adler Mannheim mettent trois pions dans la première mi-temps et on a cru que le mieux qui resterait à faire était d’écluser les bières en attendant le train de retour. Les visiteurs, qui se faisaient valdinguer contre les rambardes dès qu’ils mettaient la crosse sur le palet, semblaient au bord du suicide collectif. Et pourtant, le scénario a vite changé et la cabane est finalement tombée sur l’âne pendant que les mouches enculaient le chien. Le seul d’entre nous qui comprenait trois règles au jeu, c’est à dire Thomas, faisait le Christian Jeanpierre pendant le match : 3 partout, puis 4 à 3, puis 4 partout, puis 5 à 4. L’ambiance est passée d’une ambiance de folie à celle d’un enterrement. Les locaux ont perdu et, croyez moi, valait mieux fermer sa gueule en sortant !
Direction le Merlin, la seule brasserie rescapée du « y-a-rien-à-faire-le-dimanche-soir ». Au menu, viande argentine – comme on se retrouve ! –, vin rouge de couleur et indéfinissable au goût, red bull pour Jacquouille et une pomme et au lit. Au grand désarroi de la bombe russe qui faisait le service. Elle a assisté impuissante au passage de douze french rugbymen avec un certain Kiki qui lui a volé le cœur avec des images d’Epinal et de Paris.



Le programme de lundi est un remake de : Et au milieu coule une rivière ! C’est un film de cul me demande Kiki ?
On s’est tous retrouvé à dix heures sur les quais. Des têtes connues et des nouvelles têtes des lions de Heidelberg nous attendaient en trépignant. Ils étaient pressés de nous montrer que eux aussi pouvaient nous faire le vieux coup d’un Bordeaux/Cadillac en bateau. C’était bien tenté.
Quelques minutes plus tard, le Neckar nous écartait les portes de ses écluses pour y enfiler notre péniche, sous le patronage d’un ciel bleu et l’aimable participation du soleil.
Le petit déjeuner à peine oublié, une table est dressée avec ce qu’on appellera un pâté maison, un boudin maison, une sauce gribiche maison, et des bouteilles de bière par centaine. Même pas peur, on y va.
Dans un décor bucolique et au milieu d’une végétation dorée aux couleurs de l’hiver, on s’enfilait les bouteilles comme des sagouins. Le trajet ne se compte plus en heures mais en bières, il a duré 11 bières.
A 14 h, le pied à terre, une brasserie type de la vieille ville se trouve sur notre chemin. Il n’en fallait pas moins pour que les soiffards en pays tudesque succombent au chant des sirènes en pression d’un litre. On y fonce la tête baissée. Comme son nom ne l’indique pas en France, une brasserie en Allemagne brasse logiquement sa propre bière. On a donc le droit au brassage du jour servi par des blondes qu’on appelle ici les « poules de brassage ».
Je me souviens qu’on a mangé un truc avec en vue, la soirée gala en cette veille de départ.
Costards, cravates et dégaines embiérrées, on déboule à la soirée de gala organisée en notre honneur. Tout le gratin du rugby local était là et, sur les tables, clignotaient des centaines de cœurs rouges que chacun a épinglé à son veston. On avait l’air malin en arrivant, on l’a eu encore plus.
La réception des allemands était dans les règles de l’art. Un orchestre jazzy dans un coin, projection des images de nos 40 ans dans un autre, le menu personnalisé et illustré avec la photo des deux équipes sous le titre de la soirée : « Troisième mi-temps », en français dans le texte. Le coup d’envoi est donné : petits fours et défilés d’épouses. Les petits fours ont eu un succès d’emblée, les épouses aussi. La liste des dames sans cavaliers a été donnée à Kiki. Kiki, les petits fours, il s’en branle.
Comme à l’accoutumée, les trois archis de service ont rempli leurs rôles respectifs. Gwen a bu des bières, Arnaud a fait un discours et Jérôme affiche une cuite au troisième verre. On est dans les temps.
On mange, on boit et on parle miraculeusement l’anglais. Sauf le grand Thom qui s’est mis miraculeusement à parler tout court. On découvre, au troisième jour, que Thom parle couramment la langue de Goethe. Ça aurait pu nous servir si on l’avait su mais personne n’a eu envie de le lui reprocher.
La fin du repas a pris des airs d’une émission culturelle sur arte. Une chanson version française, une autre version allemande. Après ce bref concours d’eurovision, l’Amiral sort son biniou et lance le bal. Face à cette exotique concurrence, l’orchestre se retrouve au chômage, l’occasion pour le Toulousain de vérifier si les quatre musiciens connaissaient Nougaro.
Pas de tandem franco-allemand en vue pour Kiki. Il revient à ses premiers amours et boit des bières. Donatien le console et trinque pour la sortie du nucléaire.
Sur le coup de 3 heures de mat, on s’embrasse et on se serre dans les bras et on jure tous les dieux de se retrouver le plus tôt possible. On aurait pu verser une larme tellement le séjour était réussi et tellement on était bien accueilli. Ce n’est qu’un au-revoir.
Direction discothèque en attendant le train de 5h30 du matin. Tout le monde était sur le quai, l’air bouffi certes, mais heureux du séjour.



Sur le chemin du retour, on fait une escale pour libérer Paris. Dans le train pour Bordeaux, on replante le décor : vin rouge, pâté, saucisson et boudin. Un concert a capella de ronflements fut donné en hommage à Heidelberg by night. Personne n’a tiré la sonnette d’alarme.

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