08 novembre 2013

Le cuistot de la semaine : changement de pré ravit l’Archi

Par Mozart


En ce premier mardi de novembre, les efforts conjugués de Patrick D. et Lolo pour trouver un lieu d’entrainement dans un périmètre nous permettant de rallier notre trou à rats à l’heure qui convient, ont guidés nos pas (et nos roues) jusqu’au Collège Victor Louis de Talence. Nos boites mail ayant été alimentées par Patrick en documents de navigation de grande précision, c’est sans difficulté que la petite vingtaine d’Archiball désireux d’ouvrir un nouveau chapitre de la vie de notre Club, trouve le chemin du lieu de leurs futurs exploits. Nous laissons derrière nous le sympathique terrain d’Eysines qui nous a si bien accueillis. Nous ne pouvons que remercier chaleureusement ceux qui nous ont hébergés durant cette période d’errance provoquée par notre éviction de Musard. Le Rugby de l’élite immergé dans son narcissisme ne veut plus s’encombrer de certains des membres de sa famille, un peu comme ces ados honteux de leurs parents sans lesquels ils ne seraient pourtant rien. Dont acte.

Ce sera donc pour les Archiball un retour à l’adolescence et au collège. Effectivement, l’impression de fraicheur juvénile est saisissante. Les bâtisses qui entourent le terrain paré de ses poteaux de rugby et ceint d’une piste d’athlétisme, confèrent au lieu, en ce soir sombre et semi pluvieux, un cachet so British. On sent l’endroit fait pour recevoir l’amoureux de l’ovale. L’éclairage est remarquable, l’herbe épaisse renvoie à chaque pas une sensation de confort qu’apprécient les articulations fatiguées. Sur cette surface parfaitement bombée, pas une flaque à signaler, ce qui est une performance, compte tenue du temps épouvantable de ces derniers jours. Nous ne tardons pas à comprendre que nous sommes pile dans l’axe de l’une des pistes de l’aéroport de Bordeaux Mérignac. Ce soir Eole a orienté son souffle assagi, pour qu’à intervalles réguliers, les avions en approche finale glissent par dessus nos têtes, en pente douce, réacteurs au ralenti, jusqu’au seuil de la piste 29 de l’aéroport tout proche. Une noria de lumières intermittentes étoile un ciel resté sombre et menaçant, mais miraculeusement sec, après quelques jours d’un déluge quasi ininterrompu, agrémenté de violentes bourrasques. Cette accalmie météorologique, apparaît comme un heureux présage à la venue des Archiball sur leur nouveau terrain, désormais lieu de leur rendez-vous sportif hebdomadaire.

Il est à constater que la séance de touché se déroule dans une ambiance très zen. Pas le moindre éclat de voix, pas une contestation. Les séquences de jeu se succèdent dans le plus parfait fairplay. Le Douanier est là à nouveau, bien en jambe pour une reprise, Doc Pascal et Regis également. Grognard revenu aux affaires ces derniers temps est dans un registre plus manieur de balle, mettant en valeur les jambes de feu de Toto. Et toujours pas de ralouille, bien au contraire. On peut assister à des échanges surréalistes, du genre :
- Ne pensez vous pas cher ami que cette passe était très légèrement en avant ?
- Si fait mon cher, je vous prie de m’en excuser et vous rends la balle.

De là à penser que l’endroit est chargé en ondes positives propices à la zénitude, il n’y a qu’un pas que je ne franchirai pas aujourd’hui. L’avenir se chargera de confirmer, ou pas, cette hypothèse. Ce qui est sûr, c’est qu’il règne en ce lieu une atmosphère très agréable. A la fin d’un chapelet d’attaques magnifiques, de gestes techniques rares et sur un score dont tout le monde se moque, passage par les vestiaires confortables et bien chauffés. Nous prenons ensuite la direction du Trou, c’est tout droit !

Ce soir c’est le grand Thom qui est à la marmite dans un trou bien garni. Le grand Thom, il cuisine comme il joue au rugby. C’est du sérieux, du solide, de la valeur sûre. On respecte les fondamentaux et on s’engage à fond. Pas de round d’observation, il faut marquer les esprits d’entrée, on est sévère dés le coup d’envoi. Et sur le coup d’envoi, il nous met tous sur le cul en nous sortant l’arme absolue, sa Garbure. Et la Garbure de Thom, vous avez remarqué que j’ai mis une majuscule à un nom commun, elle est majuscule la Garbure de Thom et n’a rien de commun. Vous croyez peut-être que je vais vous donner la recette, vous dire qu’il y avait ceci ou cela dedans et que c’est pour ça que c’était si bon ? Vous vous fourrez le doigt dans l’œil jusqu’aux poumons. J’ai pas le droit de vous le dire ! J’ai signé une clause de confidentialité. Elle est classée « secret défense » la Garbure de Thom, comme la soupe aux choux de De Funès. Si vous n’avez pas tout noté en mangeant, vous êtes marrons, vous ne saurez jamais. Même si les plus pugnaces veulent faire une analyse de selle, là aussi c’est trop tard. Vous voyez bien qu’on a volontairement retardé la parution du blog et que, sauf si vous avez un système digestif de boa constrictor, c’est foutu. Il reste, peut-être, un léger espoir à ceux qui en ont repris pour le dessert. Mon voisin de table, invité de Bernard P et Béarnais pur jus en avait les larmes aux yeux de bonheur, et pourtant le Béarnais il connaît ça la garbure (vous avez remarqué ? sans majuscule…)

Bref je vous disais que Thom il cuisine comme il joue au Rugby et ceux qui ont eu le bonheur de Matcher avec lui savent combien son jeu rugueux peut être empreint d’une grande finesse, de beaucoup de justesse, et dans tous les cas d’une grande générosité. Et c’est précisément la finesse qui arrive maintenant dans nos assiettes sous la forme d’un Jambalaya poulet crevettes, mitonné avec amour.

Le Jambalaya est un plat typique de Louisiane et plus précisément de la Nouvelle Orléans. Il existe des Jambalaya à pratiquement tout : Jambon bien sur, d’où le début du nom, mais également saucisse, gambas, huitre, bœuf, volaille. Le dénominateur commun est le riz créole, « ya » signifiant riz en Afrique de l’ouest, et la multitude de légumes et aromates qui l’accompagnent avec en filigrane la présence persistante de la coriandre. Ce sont les esclaves créoles qui ont créé et vulgarisé cette recette. Les Occitans n’ayant peur de rien, selon Frédéric Mistral le mot occitan jambalaia désigne un ragoût de riz avec une volaille. Les fourchettes claquent, si tu en veux plus, ressers toi, il y en a. Les verres remplis sur ordonnance du docteur es wine, Jean-Phi, accompagnent dignement ce mets fin et les chants éclatent, témoins de la satisfaction générale.  

A l’heure du dessert, sur fond de musique de cirque, les garçons de piste n’ayant pas eu le temps d’installer les filets de sécurité malgré la prise de risque maximum, le lancé d’assiettes fait quelques victimes, heureusement uniquement parmi les assiettes. Le bon fromage au lait accompagné de sa confiture de cerise, précède une mousse au chocolat maison servie avec générosité, qui trouve preneurs sans difficulté. En revanche, la crème chantilly, maison elle aussi, qui devait accompagner la mousse a fait Pchitt ! Elle stagne piteusement au fond de son saladier, victime d’un phénomène inconnu que la science expliquera peut-être un jour. En mesure de représailles  certains se resservent une louche de mousse.

L’origine de la crème Chantilly est attribuée avec plus ou moins de certitude au grand cuisinier et pâtissier François Vatel qui comme chacun sait, se suicida après avoir raté un truc au service du Prince de Condé. Rassurez-vous, notre Thom n’est pas du genre à se faire du mal pour un peu de crème fraiche qui n’a pas voulu gonfler. Comme je disais au début Thom c’est du solide, du fin et du généreux, et c’est exactement ce qu’il nous a mis dans l’assiette ce soir. Y a pas de hasard !

En ce beau jour, c’est aussi l’anniversaire de Franck Grozan. On y va en chœur de notre « Happy birthday to you  Franky » et on boit du champagne à sa santé dont on souhaite vraiment qu’elle soit au top. Frank, au club, il est dans la catégorie Totem. C’est la sagesse, une des mémoires du Club, de son passé naissant, son présent bienveillant, un sourire inusable, un bon mot toujours prêt. 

Avec tout ça le temps a passé et il est l’heure pour le castor de regagner ses pénates non sans avoir un peu trainé au comptoir, histoire de prolonger la magie de l’instant. A mardi.

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