17 octobre 2014

Le cuistot de la semaine : au Trou, la moule inspire

Par Le Barde


L'automne, le doux automne est là. Les bateleurs sont de retour. Foin des canaux et vive le pré. Don nous a rejoint. Alléluia ! Le seul bateau ivre, c'était Jean-Phi. Un brelan d'Eric, une pincée de Dudu, une touffe de Léo et le tour est joué. Peyo se prenait pour Toto et Titi pour lui-même. L'ambiance était bon enfant, avec un Régis au sommet de son art. Il y eut des essais, beaucoup d'en-avant, de passes tutoyant l'herbe plus que de raison. Mais après tout la raison, on s'en branle puisque l'on s'amuse. S'amuser : ce luxe, cette jolie manière de faire la nique au temps. Nous sommes enfants de la balle, ce qui, invariablement nous ramène au trou. Car nous sommes callipyges. Amen.

Au trou, Yann (Larroumecq) était de service. Lorsque Donatien descendit les marches, pointa son corps amaigri par trop de coups de rames, l'assemblée chanta :

« Rame, rame. Rameurs, ramez.
On avance à rien dans c'canoë.
Là-haut,
On t'mène en bateau :
Tu n'pourras jamais tout quitter, t'en aller...
Tais-toi et rame.
J'm'en vais 
Mais l'eau est lasse. »

Yann a quelque chose en lui de Titi. Le Lou Gascoun était, en effet, de rigueur avec sa mâche, ses gros cucurbitaceae, ou, si vous préférez, ses cucumis sativus. C'est bien connu, le cucumis sativus appelle la moule, et c'est tout naturellement que des moules au curry advinrent. Avec du riz pilouf. Il s'agit d'une nouvelle variété. Le riz pilouf, le riz qui étouffe, impuissant à séparer ses grains. Des touffes de riz si vous préférez. Des touffes de riz qui étouffent. D'où son nom qui tire ses origines du lointain Caucase. Force est de reconnaître que la moule est rare au trou. Grâce soit donc rendue à Yann d'avoir renoué avec la moule. D'autant qu'elle inspira la tablée. Une muse la moule. Un véritable florilège se propagea dans le trou.

C'est Croucrou qui entama les hostilités en lançant un « Faites la moule pas la guerre » qui trouva un écho chaleureux chez notre Jacouille. En grande forme, Croucrou interpella Dudu : « Tu as déjà fait des mammographies à des moules toi ? » Un rien dédaigneux, Dudu lui répondit : « les mytiloïdes ne sont pas de ma clientèle ». (Dudu qui évoqua le tournoi à toucher de Tarbes en précisant qu’il y eut cinq parties des dix minutes : soit cinquante minutes. Dudu a l’âme mathématique.) Et Léo d'entamer : « Ah ! Qu'elles sont jolies les moules de mon pays. » Léo, nanti d'une chevelure épaisse qui lui donnait un petit air de Ricky Nelson. Mais en brun, en poivre et sel. Je l'imagine chantant The sun is Sinking un the west. Avec le Tcho en Walter Brennan et Perdigue en Dean Martin. Perdigue en Dean Martin, ça se discute, j'en conviens. Walid, peut-être, serait plus à son aise.

Le trou s’était transformé en moulodrome. La muse moule n'en finissait pas de titiller notre imaginaire. « Jean-Philippe est habité par la moule » dit Lolo. Croucrou, décidément très en verve, d'ajouter : « J'ai la moule sur le bout de la langue » en jetant un regard énamouré vers Amélie. Et les deux Eric de conclure : « Ce n'est pas très élégland toutes ces moules au trou ». Oui, rarement le trou ne fut si inspiré. Il faut dire que Yann a la moule abondante. Tout ça sous l'œil attentif de Titi qui avait, selon Lolo, un petit air de Marcel Achard. La faute à ses lunettes. Pas l'ombre pourtant d'une moule dans l'œuvre d'Achard. C'est Pépé qui l'a dit.

De la moule, on passa à Saby. Allez savoir pourquoi ? Yannick : « Tous les mardis on boit du Saby Brahim ». Et le trou d'entonner : Lundi du Saby, mardi du Saby, mercredi du Saby aussi... On eut droit également au Saby broyeur et à la Sabynette de Noël. Oui, le trou était inspiré. Très inspiré. Moule ou Saby, peu lui chaut. 

Côté lancer d'assiettes : RAS, Yann à la main précise. Un zest de fromage et Jean-Phi de demander s'il y a des moules givrées au dessert. À défaut de moules givrées : des tartes aux pommes avec de la glace à la vanille. La tarte, cependant, n'est rien sans son moule : il lui donne forme. Ne confondons pas les moules cependant. Si l'étymologie du mollusque vient du latin musculus : petite souris, celle de la matrice qui accueille les tartes, charlottes et autres plats, vient du latin modulus.

Les castors regagnèrent leurs pénates. Et tous d’avoir à l’esprit cette pensée de Sengai que leur avait délivré la Fée avant de les quitter : « Ne soyez pas arrogants. Le cercle parfait de la lune ne dure qu'une nuit. »

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