Putain que c'est bon !" dit Perdigue en sirotant une bière. Son exclamation ne devait, cependant, rien au houblon. Non, il était tout simplement heureux de retrouver les siens chez la Fée qui lançait, comme d'ordinaire, la saison nouvelle. La vie est un conte lorsqu'elle commence ainsi, un conte plus vrai que nature. L'imaginaire est une chimère lorsque l'on sait saisir l'or de la vie.
La pétanque était, bien sûr, de circonstance. Nous nous affrontâmes par triplette. Deux boules chacun et sus au cochonnet. Les parties furent âpres, disputées. Nous étions nombreux à taquiner la boule. Même la Jacouille s'y mit et notre éternel Coco. Les anciens avaient fait le déplacement. Le Tcho s'épargna de lancer le métal, mais il était là, malgré sa villégiature basque. Pépé aussi était là. Et la jeune génération aux ardeurs tempérées par la présence de ceux de l'entre-deux comme Léo ou Lolo.
Tous de craindre l'ogre Hamilton et son tir redoutable. Ce fut pourtant la bande à Léo qui l'emporta. La faute à une courte défaite de l'équipe de l'ogre contre celle du Prez, avec un Perdigue en état de grâce. Une grâce efficace devant beaucoup à l'esprit de géométrie du Prez. Il fallait le voir préparer son coup, scrutant longuement le terrain, l'analysant, puis, d'un geste auguste, déployer un ras souverain. Certes, la performance n'était pas toujours au rendez-vous. Mais quelle science, quel art.
Seb avait la main leste. Serge aussi. Ça canardait sec. Le vieux quatre pliait tant bien que mal sa carcasse pour tenter l'impossible et n'y parvenait pas. Il faut dire que Jean-Phi ne l'aidait guère ; il avait la tête ailleurs. Kiki se démenait comme un beau diable, mais il a la main plus pala que boule.
Le Barde était à la fête, l’orateur est amateur dans les boules, il n’y trouve que du plaisir comme quoi l’écrivain se sublime ses boules en main. Point de bonnes aventures dans les siennes, les boules du poète ne sont pas en cristal et ne prédisent que du présent. Elles sont bien homologuées à croire leur course ferrailleuse pour atteindre le but. Le barbu ne pointe pas, il prose ses boules sur l’interstice, il ne tire pas, il tyrade la récalcitrante et sa cerise, il joue en alexandrin se limitant uniquement à douze points. Alain lui c’est un fignoleur, le treizième il le garde pour lui. Il survole l’action avec sa radio de Dudu.
Le temps était lourd. Le temps passait. Et ce fut l'heure du premier repas.
La fée s’obligea à sortir clochette afin que nous abandonnassions nos paires en action. La pleine lune est ainsi quand le cochonnet est de sortie l’attraction est de mise rendant la décroche difficile. Le castor joue du coup à plus d’heure. La mesure ralentit le temps. Einstein sortit de sa baignoire et trouva sa pomme dans la démesure castorienne. A défaut de soufflé nous évitâmes du coup un soufflon. Les vieux, respect oblige étaient déjà assis. Nous eûmes une piémontaise, une niçoise et du boudin pour commencer. Les castors arrosèrent le tout par des offrandes issues de leurs expéditions estivales. Certains sont partis loin, d’autres sont accrochés à leur patrimoine Sabitiale, et les hestayres couchés tard partagèrent leurs glaçons. Certains rosés se profitent avec beaucoup de glaçons. Et « le temps vin » me souffla Perdigue. Les viticulteurs à défaut de grappe maitrisent les billes et les boules. La saison est chaude et les raisins au régime sec. Nous eûmes donc la suite du rôti et des patates, Alain Charles étaient aux anges. La saison a bien repris. Pâte et patates sans erreurs de frappes. La fée fait dans le bolide. La saison sera sûrement solide.
Le Prez se leva. Il a les bras longs depuis qu’il supervise le jeu de ses paires. L’attente et le poids des boules lui on fait gagner quelques longueurs de bras qui plongea Peyo dans un grand désarroi. « Putain un polo manche longue en taille M avec les manches en XL, Titi avait la raison la boutique chez les castors c’est à se mordre sa queue plate… ».
Le Prez siégeait debout pour ouvrir le ban. La fée s’ordonna et rangea son cor de raison. Les annonces furent multiples. La première est un rappel de l’open dominical des golfeurs à queues plates. Il est de tradition que les castors fassent corps pour le club (de golf en l’occurrence). Les places sont à réserver dans les gammes musicales du Do mi. Deuzio, la saison rugbystique va être sportive, finit les roucouroulades en touché. Les matchs promettent des sortis. Nous avons retenu pour les castors nostalgiques, un match retour des castors qui ont suivi le fil d’Ariane. Si tu ne vas pas à kourou, le kourou viendra à toi. Bref la saison a repris, Rugby, Golf, Bouffes. Les doodles sur les startings bloquent ! Le Prez le regard visant le loin, debout au pied de la pyramide de Coco, la main dans sa chemise, le bicorne en éventail, les boules en apparence, « Voyez mes castors au dessus de notre pyramide 88 ans nous contemplent… ». Le Grognard badait son petit caporal devenu grand. Lourdes retrouva son immatriculé conception. Tarbes mimait son ours. Coco culminait. La fée ferma le ban.
Nous eûmes du bon fromage et ses noix. Jeu de boules oblige. Une tarte aux pommes, un café et point de belote. Les boules c’est bien mais ce n’est pas le trou. La nature est plus forte que tout, la fée en alimentant la tradition entama les fondamentaux de toutes rencontres à venir.
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