Il y avait bien quelques bonnets. Pour la forme. L'hiver n'était guère agressif. Un froid ordinaire, de saison. Un petit froid de rien du tout, parfait pour taquiner la gonfle. Le Tarlousain était là. Pioupiou itou, planté sur son aile. Pas de Tarbais, pas d'Hamilton. Mais Serge bien sûr. Ou Jeff. Perdigue nous rejoignit sur le tard et se blottit contre son Prez. Jean-Phi cherchait des hémistiches sur le pré, égrenant sa course comme un alexandrin. Douze pas, pas davantage, afin de bien marquer la césure.
- Pourquoi t'arrêtes-tu lui criait Pioupiou ? - Parce que je l'ai retrouvé lui répondit Jean-Phi.
- Quoi d'ajouter Pioupiou ?
- L'Alexandrin lui murmura Jean-Phi, c'est le pré allé aux nuages.
- Putain, j'y comprends rien, ça me gonfle.
Et de se tapir un peu plus sur son aile, hermétique à l'hémistiche, le hiatus et tout le tralala. Le Bardatruc s'en branlait et le Bardibule aussi. Ils courraient. Le pré est un poème.
L'équipe du Prez prit une branlée. Les forces étaient inégales. Même avec le Prez. Les jambes et l'art étaient en face. Il y a des soirs comme ça, au printemps comme en hiver. Perdigue avait choisi le bon côté. On ne lui en tiendra pas rigueur. Titi également. C'est comme ça. Guitou aurait lui aussi choisi le camp de la gagne. L’homme avec ses ascendants de mousquetaire a du nez pour s’accaparer le vent de la victoire. Le gascon aime la gagne. Il est bon et beau notre Guitou ! Il a du caractère. Sans être Cyrano, il aurait choisi le camp de Thomas pour sûr ! Une vraie mobylette, celui-là ! Une vrai 103 SP avec pot ninja et guidon torsadé en prime. Le froid n’est pas un obstacle pour le coureur. L’esprit d’équipe se fait autour de son accélération. Au niveau jeu, le Barde annonce et alterne le jeu entre une Thom1, une Thom2 et la spéciale Thom. Bref cela crée des espaces car tout le monde défend sur Thom sans pouvoir le saisir. Certains disent qu’ils préfèrent jouer avec lui car autour de lui il fait chaud. Question de déplacement de matière et de vitesse cumulées. En face le mouvement est plus statique. Du coup les mains plus froides. Ainsi va le jeu. Jeff sauva l’honneur sur un exceptionnel retour intérieur dont lui seul à la botte. Cette fameuse feinte qui repart à droite quand le jeu est à gauche. Elle surprend dans son habitude. Walid a son tourniquet, Jeff son retour intérieur, Thom ses crampons… ainsi va le pré… Nous retournâmes nous doucher dans le vestiaire d'antan, sous les tribunes de Musard, à l'ombre de l'histoire.
Un entraînement encore nordique !
Pour l’occasion, les vestiaires, côté synthétique, étaient fermés pour travaux (durée indéterminée). Nous eûmes donc les honneurs du vestiaire 1 sous les tribunes. Nouvellement équipé de douches avec mitigeurs et de brosses vertes dernier cri pour gratter les crampons à l’entrée, on mesure la confiance du management Ubbesque à terminer dans les 6 ou 7 cette année…encore.
Sur le pré, que du beau monde. Quoi de plus normal alors d’assister à du beau jeu ! Si peu de râlerie et de mauvaise foi qu’au bout de 45 minutes les jambes tiraient et le souffle venait à manquer.
Pas de fait de jeu marquant. Dudu enfuma bien un joueur mais comme l’auteur de ces lignes a un devoir de réserve implicite, je ne détaillerai pas … Ou plutôt si, puisque j’ai osé, par le passé, moquer ceux qui se faisaient hypnotiser par la « Force ». En effet, se faire statufier/pétrifier/méduser/figer par Dudu tient de l’expérience métaphysique intense. Perdigues en est témoin, Dudu et moi étions l’un à côté de l’autre et à l’arrêt, je n’avais qu'à tendre le bras et pourtant je ne l’ai pas fait ! Pourquoi ? Aucune idée, rien de rationnel. Arrivé souvent en avance ne déposerait-il pas de micro-objets vaudou à l’emplacement de ses futures victimes. N’appliquerait-il pas des filtres paralysants au moment de la bise de bienvenue ? Si comme moi vous pensez avoir été visité par les étranges pouvoirs de Dudu, n’hésitez pas à nous rejoindre tous les mercredis soirs dans notre groupe de paroles. Bardibulle, expert en stress post traumatique, essaiera de sauver les plus résilients…
21h35 sonnait, épuisés d’avoir lutter contre le froid et jouer sans râler, il ne nous restait plus qu’à rejoindre le Léonard de Vinci du poulet rôti.
Léo nous attendait, ceint de Pépé, plus jeunot que jamais. Pépé donne à l'être beaucoup de talent. Les ans l'augmentent chaque jour davantage. Donc Léo nous attendait, le cheveu touffu et la barbe avenante. L'amiral devisait avec Stéphane qui devisait avec JB. Mozart était là. Pour la plus grande joie de Don. Et de murmurer des vers.
Quand JB est là tout va. Dans la série des membres honoraires, les honorables sont là. L’amiral a retrouvé bon port. Il siège à côté d’un aviateur. Quoi de mieux que l’aéro-n’avale pour une soupe. Jacquot en face se chauffe au gaz. Point de bons moteurs sans préchauffe. La soupe sera aux potirons. L’art est à la réchauffe même si notre météorologue trouve dans chaque degré négatif une césure positive. Si le Barde pronostiquait la météo, il ferait toujours beau. N’est-ce pas là la magie de l’écrivain de rendre les choses acceptables. Son sublime réside dans une transposition calligraphique de la chaleur d’une soupe à l’intérieur quand dehors il fait froid. Il y a toujours la nostalgie intime d’un endroit où il fait toujours chaud. PiouPiou ce moment de grâce, il le trouve dans le trou. Pour lui, la soupe reste louche. Il n’en prend qu’une à l’occasion. Le douanier filtre de son côté les assiettes pour le bout. La frontière du bonheur garde sa barrière. Don de son côté effeuille l’intégral. Le trou est source de matière à créer. Du néant jaillit une soupe. L’évolution nait de sa soupe primitive, et toute régression se retrouve dans un potage. Castor Freud écrit son 5ème essai non transformé sur le sujet. La vignette est : « le castor dans son potage ». Il apprend de son mentor l’Amiral à quai « La mer reste une soupe comme une autre ! ».
L’appel de la suite se fit entendre. Eric se la joue régression et cantine en même temps. Poulet rôti nouille. Le douanier souleva son verre vierge de tout Guillou pour chercher son âge. Piou Piou lui rappela que les verres à pied n’ont pas d’âge et le Prez remis de l’ordre dans la cantine. Le jeu à Trez est complet à table. Une discussion trouva son fil dans le devenir des tasses. Les tasses s’entassent. Voilà un sujet de réflexion pour le bureau. Le Prez écoute les idées qui fusent. Le chef castor écoute sa tribu, il est proche de ses poilus. Le trou sans poil c’est comme un castor sans tasse. L’union est éternelle. Piou Piou du coup pousse les vieux à la resserve. Pourquoi tant de sacrifice. Les poulets sont rôtis. L’explication du cuistot est légère devant la quantité. Car pour lui si tu le coupes en quatre ou en deux la quantité n’est pas la même. L’amiral hisse la grande voile et préfère la morue. Point de découpe en vue, l’océan est infini. Pour résumer, la masse castorienne ne put avoir raison des poulets sacrifiés sans parler des pâtes à Thrace. Le cuistot s’est basé sur un savant algorithme prédictif pour évaluer une approximation d’une quantité potentielle pour s’assurer les clémences d’un trou affamé. Le logiciel était périmé ! C’est sa découpe qui eut en revanche raison de la marée.
Une assiette n'est rien dans les mains de Léo. Il la dompte, la maîtrise. En sorte que le lancer n'est plus qu'une formalité. Pas le moindre déchet. Une manière souveraine de dominer son sujet, de rendre l'objet accessoire. Puis Léo de nous adresser du Rustique, un camembert au fumet marqué. Le douanier savourait. Titi s'employa à vanter les charmes du rustique. "C'est l'alpha et l'oméga de la com dit-il, un défi à l'air du temps. Il faut mettre le holà aux illusions du présent." La Jacouille opina du chef.
Des galettes parisiennes conclurent nos agapes. Et la Jacouille d'être roi, de déposer sur son béret une couronne méritée et, somme toute, naturelle.
Toujours pas de Walid pour honorer la belote de comptoir. Jeff, encore une fois était en mains. Léo, lui, était en voix et de broder de vertes paroles sur l'air de It is not because you are. Les rimes étaient riches. Tant pis pour Jean-Phi déjà parti rejoindre ses vignes. Le Tarlousain appréciait. Et se mêlait au chant. Jeff gagna la partie et Léo la perdit.
La nuit nous attendait. Le ciel était dégagé. Quel joli croissant de lune dit le Bardatruc et d'enfourner son vélo. Le Bardibule s'amourachait des étoiles et inventait des constellations pour un Pioupiou muet et admiratif. Une manière comme une autre d'écrire. Le ciel est une page.
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