Par Le Barde et Bardatruc
C'était un temps de palombière, c'est-à-dire un temps très doux, d'automne où il fait bon s'adonner à de fraternels us et coutumes.
Nous étions douze, enfin treize. Pascal Roumégou rechaussait les crampons. L'expression ne lui sied pas puisqu'il tient les crampons pour un objet superfétatoire et s'en dispense. La Piballe était aussi de retour et se glissa sagement sur une aile. Dans sa grande majorité la petite kyrielle de joueurs était plutôt verte ; la partie fut alerte. Ce qui ne signifie pas que les vieux n'avaient pas la main leste. Bien au contraire.
Si les débuts de l’équipe ‘’expérimentée’’ furent délicats, la suite leur permit de briller magnifiquement. La justesse du tempo, la précision des passes. Régis était tranchant comme un aphorisme de René Char. Quant à Yan, il fut souverain. Comme le dit si bien JB : "Yann est un trois-quart centre dans un corps de première ligne." Le Barde influa la vitesse et Dudu le trouble.
En face pourtant une équipe plutôt jeune et vaillante mais totalement désorganisée voire décontenancée. Il y avait en effet dans ses rangs, un invité dont les statistiques ont été ahurissantes tant sur le nombre de mètres parcourus balle en main que celui du nombre de passes. Ahurissantes car les mètres parcourus l’ont été essentiellement dans la largeur du terrain et ses passes à 80 % pour l'homme invisible! C’était un peu comme joué avec un poulet poursuivi par le boucher de Delicatessen.
21h33, une douche et au trou
La Fée régalait en cuisine. L'assemblée était menue mais il y avait JB et Hamilton. Le Vieux quatre aussi était là, flanqué de notre éternel Pépé. Tout commença par une pizza faite maison.
Si l’émincé de volaille en sauce nous rappela quelque peu la « blanquette de poulet curry » de la semaine passée, le gratin de chou-fleur l’accompagnant mit nos papilles en joie.
Le lancer d'assiettes fut propre, net et sans bavures. Que la fée manie l'assiette comme la baguette est, après tout, dans l'ordre des choses.
La venue du fromage fut propice à de savoureux échanges. Ils commencèrent par une pensée profonde du Vieux quatre : "On finira tous vieux". Il y avait un brin de nostalgie dans ce truisme. L'on sait désormais que le Vieux quatre a quelque chose en lui de Schubert. Son morceau de prédilection est la truffe ; cette variante de la truite que Schubert composa à quelques jours de sa fin.
"On finira tous vieux et sur le bassin" rajouta je ne sais qui, sans préciser s’il s’agissait du bassin d’Arcachon ou celui d’aisance. A voir le pantalon humide de Jacouille, il semble que ce dernier gôute peu l’air marin.
Puis, Alain-Charles s'en prit au socialisme décadent pour d'obscures raisons. Nous attendions un trait d'humour. Las, la vanne de Vannier sur le socialisme décadent ne vint jamais. En quoi le libéralisme peut être en panne.
Alain-Charles poursuivit sur notre blog qu'il avoua ne feuilleter que mensuellement. Yan eut ce mot plein d'à-propos : "Il vaut mieux lire le blog que Le Figaro."
La Piballe observait le dialogue entamé par Pascal et JB. "Pascal, il a des airs de Bébel, avec sa barbe blanche et fournie." murmura-t-il. Et c'est vrai.
La conversation roula sur le golf et dispensa une philosophie du trou mi-figue mi-raisin. Nos deux bonshommes passèrent ainsi du grand au petit trou. Yan, très en verve, commit alors cette évidence : "Quand tu vas au golf, c'est pour tirer". Et bien non, pour le vieux quatre, c'est tout sauf une évidence. Lui, il parcourt le green pour trouver des champignons. "Avec tous les pédés qu'il y a au golf, il y a plus de trous que de phallus." Le phallus n'est-il pas un genre de champignons de la famille des Phallaceae dans l'ordre des Phallales.
En dessert, un gâteau maison emballé industriellement combla les derniers espaces de nos estomacs repus.
La belote de comptoir vit le triomphe, peu mesuré, du Vieux quatre. Et la chute d'Hamilton qui, à l'instar d'Amélie, était peu en mains ou simplement dépassé par le niveau. La Jacouille n'avait pas daigné prendre part aux cartes.
La nuit était bienveillante. La petite troupe se dispersa dans la ville. Le ciel était délicieusement étoilé. La Fée fredonna l'air de la recette de Peau d'âne. Et glissa une petite larme en pensant à Delphine Seyrig. Moi, je pensais à Danielle Darrieux, celle qui repoussa la perspective de s'appeler madame Dame.
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