07 octobre 2018

Serge, de la lentille au pack

Par le Barde et le Bardatruc

Mais qu'avait donc fait Peyo pour mériter cela !

Avait-il refourgué des polos Archiball avec un logo de ragondin, une doudoune fourrée au poil de pubis de bouc, des chaussettes de Jean-Marie Messier, un costard Archi dessiné par Max Guazzini ? Toujours est-il qu'au vu des passes qui lui ont été envoyées à l'aile toute la soirée, son karma devait être cramé.
Le pauvre homme est forcément coupable puisque c'est bien toute son équipe qui lui envoya des passes au choix : de maçon priapique, de géomètre strabique ou encore de gynécologue parkinsonien.

Il n'est bien évidemment pas question de critiquer l'une ou l'autre de ses professions puisque constituant potentiellement un groupe humain, cela ouvrirait la porte à une stigmatisation, voir une ségrégation. L'Archiball doté par nature d'un humanisme universel ne pourrait s'y abaisser et puis n'importe quel maçon à la gaule, géomètre loucheur ou encore gynécologue à la tremblante, aurait mieux fait de toute façon. Quelle bande de bras cassés, rien d'étonnant donc qu'au trou, tous les coéquipiers de Peyo trouvèrent cet entraînement calamiteux ! Tu m’étonnes...

De l'autre côté, une équipe certes un peu juste physiquement et peu rigoureuse sur le placement défensif mais dotée d'une gestuelle alerte et créative en particulier celle des nouvelles recrues.
L'avocat en "maître" du jeu joua avec justesse un petit côté et fût à l'origine du plus bel essai de la soirée incontestablement. Dudu, comme à son habitude, sema la zizanie dans la défense, tandis que Zenfy nous régala de ses plongeons défensifs.
La partie s'allongea tard afin de laisser le temps à l'équipe de Peyo de lui offrir enfin une "offrande".

Lasse et choquée par ces défaillances rugbystiques, la troupe prit le chemin de la douche puis du trou.

Sergio s’était mis en quatre ; c’est la meilleure manière d’être soi en œuvrant pour les autres. Il assura. Tout fut méthodiquement préparé. En sorte qu’il pouvait se livrer à une belote avant que la troupe n’arrive. Flanqué d’Hamilton, Jacouille et du vieux quatre.

La vie du mardi, au trou, connaît d’indispensables préliminaires. On en parle peu afin de donner au pré la légitimité qui lui revient. Mais ces préalables sont essentiels. Les vieux mettent les assiettes, Stéphane débouche les bouteilles et, cela va de soi, l’officiant officie...

Donc, Sergio avait bien fait les choses. Il ménagea l’entre-deux en entrée. Il satisfit l’été et l’automne par une salade mêlée. Betteraves, endives, gouda, noix s’enlaçaient dans de vastes saladiers. Il n’en resta pas une miette. Quel art de la prévision ! Nous étions une bonne vingtaine ; la table était pleine. De petits jeunes ponctuaient la nappe de leur présence virginale.

Serge enchaîna par des saucisses lentilles. Pourquoi me direz-vous ? Et bien parce que Serge aime les saucisses et les lentilles. Ils les aiment tant que les rations servies furent gargantuesques mais agrémentées de moutarde « Fallot » si chère à notre Jacouille, cela glissa dans nos cous tel du maïs dans celui d’une oie au temps de nos grands parents. De cette époque ou le niveau de conscience du français moyen n’était pas assez élevé pour s’interdire de faire souffrir un être vivant. Alors qui mieux que Serge, toujours à la recherche de la pureté dans la passe pouvait mieux porter ce message de pureté végane. Alors merci Serge pour cette prise de conscience et ce de la part de tous les Archiballs ou presque !

Le lancer fut chirurgical. Autant dire que le doc l’apprécia. Le chirurgical n’exclut pas l’audace. Reste que pas une assiette ne se brisa. L’école lourdaise qui fit de la main l’essence du rugby a fait de beaux petits. On craignit le pire pour le vieux quatre. Après avoir rasé quelques verres, l’assiette s’arrêta devant lui. Coco aurait été heureux. Hamilton salua le maître.

Pépé et le vieux quatre conversaient sur les grandes heures du BEC, histoire de donner au bon vieux doc la présence qu’il ne peut plus nous offrir. Sergio évoquait les grandes heures d’Argelès, de la Seyne. Il y eut un débat sur l’année où l’on autorisa les remplacements. Il resta sans réponses. Le vieux quatre paraissait s’autoriser quelques fantaisies avec l’histoire. Mais c’est ainsi que naissent les légendes. Et le vieux quatre en est une.

La tarte aux pommes était tendre et croustillante. La grâce efficace en somme. Ou comment donner à l’ordinaire les vertus qui lui reviennent. Jacouille et le Prez appréciaient. Comme ils apprécièrent le rhum à damner tous les saints que Sergio déposa dans nos verres. Amélie roucoulait ; Croucrou cacardait ; Peyo jasait. Et Alban, tout au bout de la table, stridulait. La vie est cigale.

Il y eut une belote de comptoir. Perdigue en fut après avoir encaissé les recettes du soir. D’autres commerçaient. Rien que de très banal et de si agréable. La grâce ordinaire de la vie.

Une nuit d’octobre nous attendait. Douce et fraîche. Hamilton et le barde enfourchèrent leur cycle rouge. Il y avait de l’agitation à la Victoire. Sergio songeait à ses montagnes. Le vieux quatre remontait vers ses pénates en chuchotant des vers de Verlaine, épris par les langueurs monotones du temps qui passe. Mais j’ai de beaux restes se disait-il. Et de sourire à la lune.

1 commentaire:

Unknown a dit…

à propos du remplacement sur blessure, trouvé dans "l'encyclopédie du rugby français" de Pierre Lafond et Jean-Pierre Bodis.
match France / Galles 22 mars 1969, Phill Bennett remplace T.G.R. Davies, blessé au bras, à la 77ème minute.