Par Le Barde et Bardibulle
Il y avait comme un soupçon d’été. Les saints de
glace ont abusé des prolongations. Le temps redevient de saison et on
l’aime bien comme ça.
Petit
a petit, pas à pas, peu à peu, une quinzaine de castors investirent le
pré. Perdigue, de bouffe, poussa l’hybride à son comble en débutant la
partie, partie champêtre s’il en fut. Le ballon voletait, les courses
étaient vives. Une ardeur printanière en somme, l’équivalent d’un
soupçon d’été si vous préférez.
Le
toucher fut parfois acariâtre ; le toucher au sens strict, c’est-à-dire
le fait d’employer une main, qu’elle soit droite ou gauche, à effleurer
le corps de l’adversaire. Ainsi le Tarbais et Dom réfutèrent
l’évidence. Ils prirent pour une pure hypothèse, le frôlement qui les
avait bel et bien affecté. Et ce fut l’objet de longues palabres.
Sergio
nous quitta avant la fin. L’un de ses doigts subit les foudres de
Régis. Un artiste sans doigts n’est plus un artiste. Perdigue aussi,
mais pour d’autres raisons. La partie alla son train au-delà de
l’extinction des feux. L’envie se gausse de la lumière.
Il
y eut des essais, des en-avants, des passes approximatives. Mais
c’était gai, virevoltant, agréable. Dom avait prit son petit bout
d’aile., doc filait, Régis interceptait, Christophe rugissait, Joss
transperçait...
Il
était donc au trou, Perdigue, comme nous le regagnions. L’assemblée
était légèrement garnie. Tautau et le vieux quatre préparaient un
karaoké à base de fille du bédouin. Accompagnés par un accordéoniste et
un caméraman. Les cinquante ans approchent !
Perdigue
aime le fraternel. La fraternité, chez lui, conjuguent grattons et
boudin. Avec cornichons, cela va de soi. Yan qui sait ce que rive droite
veut dire apprécia. Guitou itou. Avec de la moutarde en sus. C’est fou
ce qu’il aime la moutarde Guitou. Il fallait le voir tremper son petit
bout de boudin dans le condiment si cher à notre Pinson.
Frère
Perdigue nous pardonne, la ripaille s’accompagne du mise au vert. Les
mœurs l’exigent et sa société moderne vise dans la couleur un espoir
salutaire. Sauce en prime, le cochon et la salade n’eurent raison de la
volonté des castors à consister en chœur. Les plats vides nous appelâmes
comme il se doit la suite. Le vieux 4 entre deux prises de vues se
chauffait la voix pour les patates à venir. Le vieux et ses compères
imagent nos 50 ans en chanson. Ils ont du Sardou en eux, quand ils
étaient petits castors, ils attrapaient le ballon en chantant, et
quelques années plus tard, ils gagnaient les radis noirs, en chantant,
c’est beaucoup moins inquiétant de préparer nos cinquante ans, en
chantant, et c’est tellement plus mignon de se faire mouiller le fion en
chantant, le trou c’est plus marrant, c’est moins désespérant en
chantant !
Perdigue
à force de gratter l’assiette daigna de nous servir la suite. Joue de
porc en sauce et carottes pour apprécier la vue. Car le grand absent fut
le légume ! Comment ça la carotte ne peut se suffire à l’appellation
d’origine contrôlée ? Le légume fait bon nez sur son bonhomme de neige,
mais deux patates comblent plus facilement les chœurs. Le vieux 4 pleure
sa bonne mère et Sergio suce du coup son doigt enflé. Les petits
oignons ne pourront aider à rivaliser cette ère de non patate. Le cri du
vieux 4 résonne encore dans nos estomacs de tristesse. Le grand écart
entre le sublime et l’absence dézingue l’entre en table ! Les joues, la
sauce sont fabuleux ! Que le pain de pépé pour saucer le nectar du jus…
Perdigue sa carotte il la vénère. Le légume a bon dos. Dudu ne dit
rien, son fromage il ne le sert qu’en entrée. Les facéties du cuistot
s’acceptent et les castors se doivent de protéger toutes prises
d’intervalle. Le propre du soutien, bordel. Entre celui qui annonce,
celui qui ne comprend pas l’annonce, celui qui n’entend pas l’annonce,
celui qui se fout de l’annonce, celui qui annonce à son tour, la
réussite de la prise d’intervalle ne tient parfois qu’à un miracle…
parfois à un JB, ou à un Sergio … mais sûrement à des automatismes
construits dans la constance du lien toutes générations confondues ! La
carotte à défaut fait tabac. La fille du bédouin mouille elle sa
banane!!! Castors mouiller votre maillot !
Le
lancer fut parfait à une exception près : Christophe. Il faut toujours
que quelqu’un déroge à l’unisson ; c’est comme ça. Perdigue, c’est un
calme. Enfin, lorsqu’il lance l’assiette.
Quel
Brie mes aïeux ! Il y a Brie et brie. Perdigue sait ce que Brie veut
dire. Poulet, en connaisseur, apprécia. Pour du bon fromage, c’était du
bon fromage. Chanson et Brie allaient l’amble. Nous briâmes le seigneur
de table et lui pardonnâmes son écart de jeunesse de ne voir en la seule
carotte toutes les vertus d’une patate tambièn. Le vieux 4, sécha ses
larmes et mouilla ses fesses. Le plaisir ne se contient ! Trou est
question d’équilibre. Il s’agenouilla devant le sublime poivré et orangé
du riz au lait. Il revisita à sa manière les anecdotes de Porto et
s’évada dans la chanson de Roland. Les deux font la paire. Ils en ont vu
des carottes, de l’arroz et de l’arrose. Bref, ils chantent sur les
starting block pour les cinquante ans et gèrent l’international. Les
anciens membrés ne comptent pas leurs heures en bon honoraire et
amoureux du trou qu’ils sont ! Le temps n’a pas d’emprise sur le couple.
Sacré exemple du solide ! En revanche l’absence de patates a bousculé
le vieux 4 qui ne s’est plus que motivé pour le match des anciens
castors des cinquante ans. Con se le dise. Le vieux 4 un coup de carotte
et il repart ! Après une resserve du succulent riz au lait. N’exagérons
pas !
Le
compte à rebours en haut à droite suit son décompte comme il se doigt !
Le trou ne s’est pas fait en un jour, nos cinquante ans non plus. Il
s’est construit en comptant sur de nombreuses générations de queues
plates. « Plus on est au trou, moins on a de brie ! » s’exaspérait
Perdigue heureux de satisfaire son petit comité à table. Il bria le
Saint Castor, pour que l’assemblée soit plus grande la prochaine fois.
C’est Domi qui régale !
Une
large belote se dressa ; nous étions huit autour du tapis. Et par un
singulier retournement des habitudes, Jeff et le barde l’emportèrent. Il
faut savoir patienter. Le Tarbais eut une main bien pauvre. La
Jacouille fut très déraisonnable. Une belote bien différente des autres
en somme.
Dieu
que la nuit était douce. Mai a la nuit heureuse. Mai ne nuit pas à la
nuit ; il la mène par le bout du nez. Et ce n’est pas Poulet qui dira le
contraire. Il humait la nuit, l’accueillant avec la béatitude.
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