Nous étions dix-huit. Le maître était là. Mais un maître sans chaussettes. Le pinson était aussi sans chaussettes. Comme s’ils s’étaient donnés le mot. Reste que jouer au rugby en fil d’Ecosse n’est pas la panacée. Ils firent contre mauvaise fortune bon cœur. Force est de reconnaître que cela leur réussit.
Le Tarbais était fringant. Alban itou. Jean-Phi allait ses traverses avec fougue. La jeunesse était côté Joss et Barde. Une jeunesse un peu brouillonne qui doit encore apprendre. Redresser sa course, faire une passe dans le bon tempo, c’est le sel du rugby. En face, le Poulpe régalait : trois essais. Pioupiou connut aussi la terre promise. Sa feinte de passe laissa sur le carreau son vis-à-vis. Du très grand art.
Les en-avants fleurirent ; c’est le printemps. Et la béchigue ne trouvait pas toujours preneur. Trop courte, trop basse. Une soirée d’été à oublier, sous le regard de JB.
Au trou, Joël opérait, ceint d’un tablier rose. Poulet, Hamilton et Pépé nous attendaient ainsi que le prof et le vieux quatre. Et c’est à l’italienne que nos agapes commencèrent. Un avant goût d’été bienvenu que ces tomates mozzarella avec leur basilic. Le doc appréciait.
Pour la suite nous eûmes une version revisitée de la choucroute. La choucroute porte bien son nom. Son origine se fond dans l’histoire des Huns et des Goths. Lelouch en aurait fait un film. Son sens de l’altruisme dépassant son égoïsme. La beauté est dans l’association. Joël dans le même art aurait traduit la cuisine moderne dans ce même symbole. Partage et copains ! « La comparaison n’est pas juste et se doit de se rapprocher du dit vin. » Me souffle Sabite. Jean Phi est un chou et ne rate pas d’occasion d’arroser ses paires. Le messie pour convaincre ses apôtres, à ses heures de disettes sortait son don de transformer l’eau en vin et multiplier les pains à foison. Pépé n’a rien inventé. Notre cuistot du soir son côté miracle il l’a exploité sur le pré surtout dans la multiplication des pains dixit JB en chef d’orchestre. « C’est fou ce que le jeu s’illumine dès qu’on allume la miche. » proposa dans l’intervalle notre Tarbais. En bon 10 qui suit son 9. Le castor est si proche de la vierge en absence de Lourdes. Joël son don est dans la transforme. Il transforme le chou en saucisses, en jarrets de porc, en appendices porcins à combler tout estomac insatiable. La preuve en est à chaque louche plongé un nouveau jarret se pêchait. Il est où le chou de la choucroute. La réponse en vain ne peut s’entendre la bouche prise en saucisses de Strasbourg et consorts.
Le lancer d’assiettes commença de manière cataclysmique. Pareilles à des soucoupes volantes, les ustensiles arasaient tout sur leur passage. Puis, Joël recouvra la raison et tout ne fut plus que calme, luxe et volupté.
Et c’est avec des fraises que s’acheva le dîner. Et de la Chantilly. Autant dire que la présence d’Amelie nous laissait présager le pire. Il resta sage. Peter un peu moins. Il a une conception très organique de la fraise, quasi fusionnelle. Gwen le moqua lors que le vieux quatre y allait de son timbre délicat pour accompagner la dacquoise de Joël et sa trompette.
Pas de belote. Il y a des soirs sans. Il ne nous restait plus qu’à papoter un peu, puis à regagner la nuit. Jacouille lorgnait la lune en croissant. Dudu comptait fleurette aux étoiles en murmurant des vers de Dante. Et le vieux quatre tentait en vain de se rappeler d’un aphorisme de René Char. Sans doute était-ce celui tiré du Nu perdu : « "Donne toujours plus que tu ne peux reprendre. Et oublie. Telle est la voie sacrée." Allez savoir.
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