31 mars 2010

Archi Pau contre Archi Bordeaux : Le plaisir de l’instant

Ce que Jean-Bernard a vu de la touche, écrit par le Barde qui n'y était pas

Je n'aime rien tant que profiter des plaisirs que la vie nous offre. Je les savoure, je les déguste. J'ai décidé d'y mettre des mots, un peu comme l'on redonne vie à un coupé 504, à une Facel Vega. La carrosserie est un art, un acte d’amour avec ce que d’aucuns ne considèrent que comme de la tôle. Savent-ils la douceur de l’aile d’une berlinette Alpine, la grâce des courbes des italiennes ? Ecrire, c’est carrosser ses idées ; cela exige de prendre la hauteur nécessaire, ce qui m'est familier, moi qui ait tant d'heures de vol à mon actif, qui ait survolé les continents avec ma sirène, tutoyer le paradis qui se profile derrière les nuages...
J'assistais donc au match qui nous opposait à nos comparses palois. Loin de regretter de n'être pas sur le terrain, j'ai été le spectateur ravi d’une rencontre délicieuse. J’ai goûté à chaque seconde les plaisirs de l’instant. C’était à Robert Mallet sur le terrain du XIII béglais. Les fins connaisseurs de la littérature française reconnaîtront ici mon petit hommage à Gustave Flaubert, le roi des comices agricoles. D’ailleurs le stade Robert Mallet a des allures de pré. Un carrossier est soucieux du moindre détail. Mais je reviens au match pour ne pas vous lasser de mes digressions perpétuelles. Une digression, c’est la cerise sur le gâteau, le petit supplément d’âme. Mais point trop n’en faut.
Puisque l’on était sur le terrain du XIII, c’est dons deux équipes de treize qui jouèrent une partie de quinze. Les palois n’étant pas treize pour jouer à quinze, on leur prêta des joueurs. Et pas des moindres.
Ainsi, Gwen se fit un malin plaisir de péter sur les siens qui, en l’occurrence étaient les autres. Titi à la mêlée fit montre d'une efficacité redoutable. Un lion sans crinière domptant la balle et les éléments. Il y a du Kiki dans Titi et réciproquement. Le face à face fut redoutable. Luc Bonneau occupa le centre de l’attaque paloise et démontra des talents de plaqueur que l’appât des siens révéla. Et que dire Lapiballe en talonneur, une Piballe au sommet de l’entourloupe ! Un vrai pickpocket de la règle et de la balle, un Arsène lupin de la béchigue.
Côté bordelais, Jean-Pierre en 10 formait avec Kiki une charnière printanière. Quelle vista ce Jean-Pierre ; il est béni des dieux et des autres. Toto était au centre avec Walid que je ne puis m'empêcher de comparer á N'Tamack. Même élégance, mêmes cannes. Ah ! ce port droit dans la course, ce regard perpétuellement à l’affût de l’autre, ce contre-pied aussi redoutable qu’un pas de danse de Fred Astaire, une ballade de John Coltrane. Quand vous mettez tout cela à côté des gambettes à Toto, on est dans un film de Minelli. Si Arnaud fut superbe à l'aile, Perdigue, de l’autre côté avait l’air de se faire chier. Quant à Donatien en 15, il eut ce côté olé olé qui ajoute le feu à la crête des vagues. Je ne saurai oublier le paquet, les mules. Léonard, Yann et le Douanier en première ligne ! Excusez du peu. Quant à Dominique la bourrique, à l’image de Gwen, il péta de tout son soûl.
Les essais fleurirent. Tous les castors, qu’ils fussent de Pau ou de Bordeaux, jouèrent au diapason. A quoi bon évoquer tel essai, telle action. Enlève-t-on un détail à un tableau de Léonard (pas Eric mais de Vinci) ? Et ce que j’ai apprécié au-delà de tout, c’est que les castors se mêlèrent l’un à l’autre ; il n’y avait plus de palois, de bordelais mais une seule et même équipe, séparée pour l’occasion, mais qui jouait à l’unisson. En sorte que l’une égalait l’autre et que l’autre n’était qu’une. Cela me confirma dans mes pensées.
Puis nous assistâmes, à Musard, au match opposant l’Union à la Section. A l’image des castors, les béglais furent flamboyants, audacieux, efficaces. Une belle partie de rugby. Puis nous regagnâmes notre cher trou où la soirée fut sage et amicale. Que n’avais-je pris mon saxophone à défaut de mon sac de rugby. Trois petites notes de musique n’eurent pas été de trop. Il y eut quelques chants bien sûr. Mais trois petites notes de musique qui s’en vont bien vite, eurent été de mise. Je retiens la leçon. Puis la nuit nous accueillit sur le parvis des capucins. Et regardant le ciel, je vis que la grande ourse, comme le remarqua le barde à Rovigo, avait des allures de castor.

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