30 avril 2016

La lionne et le Castor

Par Le Barde

Le soleil se dissipait. Peu à peu, ils arrivèrent à Sainte-Germaine, le pré originel du rugby bordelais pour le crunch entre les Old Lions et les castors. Deux manières d'être rugby. Les crinières contre les queues plates. Ceux de la savane et ceux des eaux. Les rugissants contre les feulards. Les carnassiers contre les rongeurs. Mais une seule et même passion, la gonfle, et, au bout du compte, n'est-ce pas, une identité commune.
 
Dudu et Guitou étaient là. Le cœur partagé. Et la Jacouille. D'autres encore avaient fait le déplacement. Comme La Piballe ou Yannick callipyge. Nous étions sur le terrain annexe de Sainte-Germaine, là où les cadettes des Lionnes triomphent si souvent. Dimanche, elles jouent une demi-finale du championnat de France contre Sassenage. C'est mon côté lion puisque ma fille est lionne. D'où cette parenthèse. Revenons-en au sexe que, trop hâtivement, l'on dit fort. Henri Michaux écrit à raison : "Garde intactes tes faiblesses."
 
A la nuit tombée, le coup d'envoi fut donné par Titi. Pas un nuage. Un froid de fin d'hiver, vif. Deux arbitres opéraient. L'affaire était sérieuse. Il y avait loin des compositions du dernier crunch qui vit la victoire des queues plates. Les deux sociétés se sont considérablement rajeunies. Le virage générationnel est en marche. Seul Titi préservait les traces d'un autre temps. Sans que cela n'apparaisse le moins du monde. L'état civil est une chimère. Donc Titi entama les hostilités puisque Titi était à l'ouverture. Il s'appliqua. La gonfle taquina le ciel puis trouva des griffes accueillantes. Une hutte se forma. Le lion se mutait en castor et le castor en lion. Sa défense, d'emblée fut féroce. La rencontre était âpre, disputée, ponctuée de coups de sifflet stridents. Ça parlait beaucoup, se chamaillait un peu. Mais ça restait bon enfant. Enfin presque. Cap'tain Gwen rameutait ses troupes, pétait comme un beau diable. Benoît découpait à merveille. Jean-Phi faisait montre de ses qualités défensives. A la mêlée Seb orchestrait. Les Olds étaient un peu plus dans le rythme. Et marquèrent les premiers. Un hommage des castors à mon ancêtre le Comte d'Anterroche et à sa légendaire injonction : "Messieurs les Anglais tiraient les premiers !". Crunch oblige. Ils auraient pu augmenter la mise, les Olds. Las, ils se heurtaient à un roc. Toute hutte est un roc. On n'est pas castor pour rien. Et sur une sublime inspiration de leur arrière. Les archi égalisaient par Maxime. De la très belle ouvrage. La partie s'équilibrait un peu. Le public grondait parfois. Les Olds reprirent l'avantage par un drôle d'essai. La hutte tint momentanément du gruyère. La vie est ainsi faite, de trous. On préfèrera notre trou traditionnel, notre hutte du 1, rue de Bègles à cette absence d'un soir. La mi-temps était sifflée.
Le public se réchauffait comme il peut. Dès la reprise, le match reprit de plus belle. Toujours aussi âpre. Regis s'en donnait à cœur joie. Le Poulpe, de son aile, hululait. Titi distribuait sous l'œil nostalgique de Dudu. Stephane suppléait Jean-Phi et le Préside était contraint à l'abandon. Puis, la joute se tempéra quelque peu n'empêchant pas les Olds de franchir une fois encore la terre promise. Loin d'abdiquer, les Castors marquèrent un ultime essai avant que les belligérants ne rejoignent les vestiaires sans déroger à la respectueuse haie d'honneur qui conclut le crunch. Le castor d'or revient à Titi. Fort marri d'être le plus âgé du sien, il démontra qu'il résistait avec talent aux aléas du temps. L'argent sera pour Le Poulpe, anniversaire oblige. Et le bronze pour Régis.
 
Nous fûmes admirablement bien reçus. Guitou nous montra les photos de son équipe d'antan. La bière coulait avant que de gagner la table où le repas fut servi. Un moment d'altérité paisible. Le discours des présidents, puis, rebelote, mais sans comptoir, la bière acheva la soirée. A l'année prochaine pour un autre crunch ! Je serai de sifflet avec une lionne !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Salut les p'tits loups
Je rajouterais, en toute humilité, que moi aussi j'étais heureux de revoir Guitou et tous mes potes et que pour ça, rien que pour ça, j'ai fait le voyage du Portugal, aller-retour, ce jeudi 28 avril. Cela méritait bien d'être souligné, aussi ....
Je vous bise .... et QLCVP (expression employée de longue date dans la "Royale"
Et à mardi ..

L'Amiral