14 mars 2008

Le guêpier magnifique

La pignole du Barde

Donatien, c’est un nomade, un vrai. Mais comme tous ceux qui goûtent l’air du large par soif du monde, il vit où il s’attache. Sa géographie est sentimentale et il sait même des cartes imaginaires où tout un chacun peut reconnaître les îles auxquelles ils aspirent. La jolie phrase d’Agnès Varda : « Je suis restée petite, mais j’ai grandi » lui va comme un gant. Seuls les gnous ou les balbuzards, et peut-être les pibales, y verront les inévitables mutations que subissent les corps mâles aux premiers assauts de l’adolescence.

Cet « impétrant magnifique » comme l’a baptisé Alain (Béguerie) appartient donc à une race de migrateurs particulière. Elle ne se contente pas d’un simple aller et retour annuel puisqu’elle migre toute l’année. Un oiseau en somme mais qui ne ressemblerait à aucun autre. A quoi bon de sordides analyses et ce vain souci de nommer. Donatien aime René Char et a fait sien cet aphorisme : « Aucun oiseau n’a le cœur de chanter dans un buisson de questions. »

Donatien a fait le choix des mots. Les émotions qu’il éprouve lors de ses pérégrinations, il a besoin de les traduire, de les prolonger. Le furtif, chez lui, n’est pas hostile à un brin d’éternité. Il y a du photographe dans cette manière de capter le monde qui n’évite pas les grâces d’une rencontre. Que n’écrit-il à son tour sur ce bon vieux rugby qui rassemble bien des attraits qui noue son rapport au monde.

Je sens que le gnou, le balbuzard ou la pibale vont m’en vouloir pour tant de gentillesse. Que voulez-vous, la plume suscite des fraternités dont le fiel est exclu. « Mais de quelle plume parles-tu mon barde » s’exclame le Libanais ! Et de me citer, de mémoire, deux définition de Robert (le petit) : « Chacun des appendices tégumentaires qui recouvrent la peau des oiseaux, formé d’un axe (tuyau et de barbes latérales, accrochées entre elles par des barbules » et « la pièce chitineuse formant la coquille interne des calmars. » C’est un puits de science ce Walid, lui, l’éditeur attitré des archiballs, qui est, en quelque sorte, leur mère poule ou leur papa coq.

Allez, si je devais donner un nom d’oiseau à Donatien, ce serait le martinet. J’ai hésité un tantinet avec le guêpier. Je me suis rétracté puisque Robert (le petit) signale qu’il signifie aussi « nid de guêpes » ou « position critique dans une affaire, ou parmi des gens qui cherchent à nuire. » Guêpier ou pas, on reste dans tous les cas du côté des hirondelles (il vaut bien celui de Swann). (Les amateurs de sensations fortes et de dentelles verront dans le martinet et la guêpière des prolongements dont je n’ai que faire).

Je sais, je sais, une hirondelle ne fait pas le printemps et les noms d’oiseaux ont d’autres charmes que celui du trille dudit oiseau… Mais il faut tordre le cou aux dictons.

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