La pignole du Barde
Notre biodiversité est sans cesse menacée. Certaines espèces sont en voie de disparition. Les archiballs n’échappent pas à ce triste sort. Certaines variétés sont ainsi en voie d’extinction. Au premier rang le Marien et le Baudet. Pareils à l’anguille et à l’alose, au lézard occelet ou à la cistude, il nous faut les protéger sous peine du pire. Le Marien est, sans conteste, le plus exposé. Ce mammifère palmé, dont seuls les scientifiques parviennent à déceler la différence avec l’ornithorynque, n’a que trop subi les atteintes de ce monde étranger à la beauté des choses. Il subit de plein fouet l’effet de serre et ne doit son salut qu’à ses replis dans ce qui lui tient lieu d’habitat : le trou. Sitôt qu’il s’en écarte, il souffle, il ahane, il geint, il gémit. Et son corps n’est plus que tremblements. Le Marien hors du trou fait peine à voir. Un bon Marien est un Marien dans le trou.
Le Marien est fragile, si fragile. Il inspire une pitié légitime. Il répugne de plus en plus à la solitude. C’est pour cela qu’il va désormais accompagné du Baudet. Cette crevette de la mer baltique, cet amphipode du nord, ne sort plus sans son Marien. Une crevette et un ornithorynque, avouez que cela forme un putain de couple. Ce n’est peut-être pas l’élégance qui les caractérise. Ils possèdent, cependant, la grâce des humbles, des réprouvés, de ceux que le monde chahute. La crevette Baudet redonne au Marien la sérénité et lui épargne un accablement dont il sait qu’il serait suicidaire. Il faut la voir se nicher sur la queue plate du Marien, titillait son bec corné pour mesurer son sens de l’amitié. Il est vrai que le Marien la prémunit des assauts de néfastes filets par ses pattes armées de griffe. Il paraît que l’on peut les deviner à marée basse, sur le bassin, lorsque le soleil se lève. Et que Kiki les appelle par de petits cris pour leur adresser d’amicales caresses.
« T’es complètement barge mon pauvre barde » me murmure Garabos. « Tu nous fais chier à avec tes calembredaines. Te casse pas. Marien c’est un enculé et Baudet aussi. Deux enculés valent mieux qu’un je te l’accorde. Mais il faut alors une tierce personne. Et c’est moi le gastéropode. Moi j’ai pas besoin de me casser les couilles. Je fais tout moi-même. Et les deux autres cons, ils n’ont qu’à me regarder . T’as qu’à demander à Zeille si j’ai pas raison. »
Désemparé, je ne savais plus quoi écrire. Et pourtant, il me semblait avoir taquiné la vérité. Ce qui n’enlève rien au fait que Garabos soit un gastéropode. Perdu, je m’enfonçais dans la nuit en marmonnant des patenôtres.
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