21 mai 2008

Le cuistot de la semaine par Jean-Paul Gaultier

Par Le Barde

A peine avions-nous pénétré dans notre antre que nous étions dans une atmosphère marine. Des algues pendaient au plafond comme des guirlandes et, dans la petite cuisine, deux compères en polo marin s’activaient. Gwen et Jérôme, c’est un peu Laurel et Hardy. Encore que Jérôme ait pris quelques rondeurs depuis qu’il est l’un des nôtres. Mais ils étaient mignons nos deux petits archis, nos deux mômes, nos deux bambinos. Il ne manquait plus qu’un air de Dalida.
Sur la table, des langoustines étalaient leur chair parfumée alors qu’à quelques centimètres des huîtres, avec un citron de vert et un citron jaune, attendaient des mains concupiscentes. L’hommage à l’amiral était patent. On entendait au loin sonnait sa corne de brume. Des doigts comme des pattes d’araignées saisissaient les pensionnaires de la mer, tartinaient, trempaient les homards de Norvège (les langoustines sont le nom commercial de ce grand crustacé marin décapode) dans une mayonnaise d’enfance. Ce n’était qu’une mise en bouche.
Vinrent alors les saumons fourrés à l’oseille (et non pas les saumons fourrés par Zeille). En l’occurrence, l’oseille n’était qu’en sauce, mais je me balance du réel, préférant l’hypothétique à la vérité. Il y eut un long silence, un silence de cathédrale. Le trou, parfois, a des allures de cathédrale. Les saumons étaient trois, on eut dit les trois grâces. La découpe fut lente et longue. La grâce se mérite. Puis, les castors jouèrent des mandibules. Ils en jouent mieux que les castagnettes chères à cet enculé de Vannier. La chair était douce à leur palais complice. Ils en redemandèrent. Gwen et Jérôme dansaient autour des tables comme deux jeunes filles en tutu. « T’en veux un peu plus, t’en veux un peu plus » chantonnaient-ils à l’oreille de leurs ouailles. On était dans un film de Jacques Demy. Et d’ailleurs, les deux compères entonnèrent Nous sommes deux sœurs jumelles comme un seul homme. La grâce vous dis-je. En bon disciple de Jansénius, j’affirme que ces deux-là iront au paradis. Comment ne pas évoquer, dès lors, ces propos du plus janséniste des écrivains français, Blaise Pascal : « La vertu d’un homme ne doit pas se mesurer par ses efforts mais par son ordinaire. »
Mais toute chose à une fin. Le saumon n’échappe pas à la règle. Ce fut donc le temps du fromage à défaut du temps des gitans (nous sommes au temps du festival de Cannes et je ne vois pas pourquoi on ne lui rendrait pas hommage à notre manière). Au lancer d’assiettes nos deux jeunes files excellèrent. Rares furent les débris fruits d’une maladresse coupable. Et le trou devint le plus grand chapiteau du monde (Cannes toujours). Enfin, le chocolat vint et s’habilla de tarte. C’est à ce moment très précis que l’algue se fit aérienne et vola de castor en castor. Certaines amerrirent sur des crânes accueillants, Tcho, le président.
Puis nous levâmes un verre à Oscar le petiot de cet enculé de Perdigue. Une putain de soirée vous dis-je. Le jury – Prof, Guitou, Yann, Pascal, le Barde et le Blogger – commit un 16. Et un 20 pour la déco. Merci les filles.

Aucun commentaire: